Amour 2, le retour
J'adore le cinéma d'Haneke mais je n'avais pas pu voir ce film à sa sortie et les mauvais retours ne m'avaient pas fait me précipiter dessus à sa sortie en DVD. Sauf qu'en réalité c'est très bon et...
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Une famille de bourgeois (ici à Calais) sous le scalpel de Michael Haneke : programme archiconnu (Le septième continent, Funny games, Caché…) et a priori alléchant qui, très vite, va néanmoins se révéler être une impasse thématique et esthétique pour le spectateur (et principalement pour Haneke). Il y a dans Happy end tout le cinéma d’Haneke synthétiser en un machin sec et atone, en un film qui ressasse : l’enfant pas très net face à la débâcle des adultes (Benny’s video et Le ruban blanc), les histoires qui s'entrecroisent (71 fragments d’une chronologie du hasard et Code inconnu), la violence qui nous entoure (Le temps du loup), et jusqu’au personnage de Jean-Louis Trintignant évoquant sa femme malade qu’il a étouffé avec un oreiller trois ans plus tôt (Amour).
Œuvre polyphonique passant d’un personnage à l’autre en le confrontant à ses propres limites (filiation compliquée, pulsion adultère, mal de vivre, suicide…), Happy end se veut la radiographie d’un monde occidental amené à s’autodétruire de ses lâchetés et de ses déficiences (mais comme le sont, finalement, tous les films d’Haneke, d’où ce sentiment de rengaine qui laisse totalement de marbre). Monde occidental en voie de déshumanisation où l’incommunicabilité est devenue une norme, le sort des autres une broutille (au mieux un contretemps), et le sexe et l’amour des pratiques virtuelles, de simples mots écrits sur un ordinateur ou échangés au téléphone. Le constat est éloquent bien sûr, mais souffre ici d’une démonstration sclérosée et désormais quasi stéréotypée (le long travelling latéral sur Trintignant en fauteuil roulant) dans son dépouillement, sa rectitude et sa prétention auteuriste pour festivals où on n’est pas là pour rigoler (voir Seidl, Andersson, Mungiu, etc.).
Il y a pourtant dans Happy end, et c’est relativement nouveau chez Haneke, une sorte d’humour à froid qui nourrit subrepticement le film, l'imprègne l'air de rien : c'est ce vieil homme qui cherche à mourir mais qui n’y parvient pas, c'est ce karaoké en mode désespéré, cette condescendance avec les domestiques maghrébins ou ces pauvres réfugiés invités malgré eux à un mariage chic. On est tout de même plus proche, dans cette scrutation d’une bourgeoisie retranchée dans ses petites certitudes (et ses jolis intérieurs), d’un Chabrol bas de gamme que d’un Haneke qu’on a connu plus inspiré et beaucoup, beaucoup plus incisif.
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