Hard Candy est un ovni dans son genre.
Une dénonciation pure et dure d'une réalité toujours aussi délicate à aborder : la pédophilie. Peut-être même la pire, celle, latente, qui sournoisement s'attaque aux jeunes filles prépubères, persuadées de pouvoir enfin se livrer à une première relation sexuelle. Le film ne fait pas dans la dentelle, et il est facile de lui reprocher une forme d'excès qui demeure néanmoins parfaitement assumée. Alors, ça passe. Difficile en effet de passer à côté de la performance d'Ellen Page, incroyable dans le rôle d'une adolescente de 14 ans folle à lier, mais visiblement portée par un désir de revanche envers un supposé pédophile et photographe professionnel. Patrick Wilson fait le job, comme toujours, mais endosse le rôle avec une crédibilité qui renforce son jeu et lui permet de tenir la dragée haute à Page, dont l'identité mystérieuse représente la clef de voûte du film. Mensonges, jeux pervers, renversement des rôles, Hard Candy distille le malaise, le doute et l'angoisse, juste assez pour donner un avant-goût à son spectateur : si vous-même tranquillement installé dans votre fauteuil frissonnez à l'idée de subir ce genre de sévices, mettez-vous à la place des victimes des pédophiles.
Emilie Autumn (et sa sublime chanson Gothic Lolita) n'aurait certainement pas boudé cette ode à la dénonciation, à l'alalie contre des hommes installés dans une vie confortable, bourrée de secrets, et surtout sans remords. Hard Candy pourrait soutenir la comparaison avec un American Mary, mais demeure plus subtil, en dépit de ses apparents gros sabots. Le personnage de Hayley toutefois, contrairement à Mary, pousse tellement loin la torture psychologique qu'elle en parvient à inverser les valeurs de compassion. On en vient à plaindre l'accusé de pédophilie, même si l'on tremble à l'idée du nombre de squelettes que sont capables de contenir ses vastes placards.
Hard Candy laisse une sombre impression de malaise, et malheureusement un manque de profondeur, quelques points du scénario assez troubles, voire bordéliques, qui ne me permettent pas de monter sa note plus haut. Une expérience de cinéma suffisamment intéressante pour qu'on s'y penche avec curiosité, sans pour autant pouvoir s'autoproclamer chef d'œuvre.