Eh bah... C'était vraiment pas génial, hein. Bienvenue dans cette cinquième critique de la rétrospective consacrée à Harry Potter ! Il est temps maintenant d'attaquer le gros morceau, celui qui a motivé la rétrospective dans son intégralité : la seconde moitié de la saga, réalisée par un seul homme, David Yates. Celui-là même qui sera aux manettes de Fantastic Beasts et probablement de la trilogie qui en découlera, sauf accident industriel.
Quasi illustre inconnu lorsqu'il arrive aux commandes en 2007 de L'Ordre du Phénix, Yates a pour mission de faire oublier le faux-pas Mike Newell qui avait transformé le quatrième opus en une copie niaiseuse à la direction d'acteurs discutable. Problème : s'il rectifiera le tir en réussissant plutôt bien (nous y reviendrons) les deux parties des Reliques de la Mort, il est aussi à l'origine d'un formidable ventre mou dans la saga, qui commence avec ce film.
Les défauts de cet épisode ne sont pas bien compliqués à synthétiser. Au contraire du livre d'origine, un pavé de 900 pages, qu'il est difficile pour Yates et les scénaristes de faire rentrer dans un film qui fait moins de 2h15. C'est donc le problème majeur : tenu à un rythme d'adaptation « 1 livre = 1 film », la production s'est elle-même tirée une balle dans le pied. En effet, le contenu de L'Ordre du Phénix est à la fois dense (beaucoup d'intrigues et de ramifications), tout en n'étant pas le plus passionnant des romans (du moins, ce n'est pas passionnant cinématographiquement parlant – j'entends par là que tout ce qui fonctionne dans le bouquin car le médium permet de prendre son temps et de développer personnages et intrigues au fil des pages, ne marche pas dans un film qui est obligé d'aller à deux cents à l'heure, car il a la trouille de charcuter franchement dans le bouquin pour élaguer le superflu. Pression du fan-service, sans doute...).
Résultat, cet opus est loin d'être mauvais, mais est anecdotique à en crever d'ennui ! Alors même que certains éléments sont d'une importance capitale : à commencer bien sûr par (spoiler, au cas où, mais ça fait 10 ans que le film est sorti, réveille-toi, l'ami) la mort de Sirius Black. Quelle scène ridicule, réglée en trois plans dont l'absence de charisme se dispute à la non-mise en scène... Alors que, zut, vous avez casté Gary Oldman ! Et vous n'êtes pas foutu de lui faire une mort un chouilla épique ? Mais même Luc Besson sait le faire, sérieux (Léon) !
Cette scène est emblématique de tout le film : on passe d'un plan à l'autre sans qu'une intention particulière soit accordée aux transitions – le film n'a ni creux ni moments épiques. « Anticlimactique » à souhait, il passe sans marquer aucun esprit, sans vendre aucune magie... Un comble, pour un film nous offrant un duel qui aurait du faire rêver entre Dumbledore et Voldemort (une scène au demeurant assez badass, mais qui implique de sortir de l'anesthésie dans laquelle les deux premiers actes vous plongent).
Au passage, puisqu'on évoque le troisième acte : est-ce qu'on en parle de cette prophétie que cherche Voldemort ? Si je me concentre sur les éléments du film, en faisant fi du livre, je sais juste qu'elle dit : « l'un ne peut survivre tant que l'autre vit ». OK, donc cette prophétie, c'est Captain Obvious en fait, c'est Monsieur Évidence. Je tiens à signaler que de toute manière Voldemort comptait tuer Harry et que Harry se doute bien qu'il ne sera jamais en sûreté tant que Voldemort sera dans le coin. Évidement qu'il faut que l'un des deux meurt ! Conséquemment, cette prophétie, qui motive tout le dernier acte, mort de Sirius Black (un moment d'émotion quand même ! Enfin dans le bouquin...) comprise, est d'une inutilité confondante. C'est même, pour les plus hitcockiens d'entre nous, un très mauvais MacGuffin...
Reste à sauver Dolorès Ombrage – et dans une moindre mesure vue sa place dans le film, Luna Lovegood. Dans un film où le trio de héros n'aura jamais paru aussi fade, sans saveur ni aspérités (mentions spéciales pour Ron et Hermione, totalement inutiles tout le long du film), la faute à un montage traître qui ne laisse place à aucun développement satisfaisant, ce sont quelques seconds rôles qui sauvent la face. Imelda Staunton et Evanna Lynch (cœur sur elle), respectivement Ombrage et Luna, sont les deux éléments de fraîcheur qui donnent un peu de relief au tout. La scène de rébellion contre la dictature administrative d'Ombrage, ersatz de Margaret Thatcher version tailleur rose, à grands renforts de feu d'artifices made in Fred & George, réussit même à frôler le jouissif.
Mais c'est bien peu à se mettre sous la dent : tout, au final, est oubliable à un degré plus ou moins élevé dans ce film. Ce n'est quand même pas de bol que ça tombe au moment où la saga entame son dernier virage : Voldemort est là, le combat à mort débute. Alors pourquoi on s'ennuie, merde ?