A Poudlard a lieu cette année un événement exceptionnel, le Tournoi des trois sorciers. Un élève est désigné par la Coupe de feu, une urne magique choisissant le nom des futurs champions, pour représenter une des trois grandes écoles de sorcellerie, et tenter de remporter la Coupe du tournoi, en traversant trois épreuves mortellement dangereuse. Or, cette année, en plus des trois champions, un quatrième nom est mystérieusement désigné : Harry Potter…
A force de voir chacun des trois films reprendre la même structure narrative, on avait fini par s'y habituer. Avec Harry Potter et la Coupe de feu, Newell semble bien décider à bouleverser nos habitudes, et malheureusement, peut-être pas seulement pour le mieux. Dès son introduction catastrophique, ce quatrième épisode fait craindre le pire.
De fait, bannissant du film l'habituel prologue servant à nous introduire dans le monde des sorciers, le scénario cherche à nous plonger dès le début au cœur de l'action, en nous faisant assister au saccage de la Coupe du Monde de Quidditch par les Mangemorts. Que l'on réussisse à nous montrer les héros assistant à cet événement exceptionnel sans nous montrer une seule image du match semble déjà relever de la magie noire, tant cela apparaîtrait inconcevable aux yeux de plus inexpérimenté des réalisateurs...
Mais le plus incroyable reste sans nul doute qu'après nous avoir fait démarrer sur le chapeau des roues sans se soucier de savoir si les spectateurs avaient eu le temps de prendre le train en marche, le film réussit le prodige de mettre son intrigue de côté pendant 1h30 pour ne nous intéresser qu'à un événement sportif qui n'est somme toute qu'une sous-intrigue, malgré le fait qu'il occupe le titre du film...
Dès lors, comme le scénario du film lui-même, non content de nous offrir des scènes flirtant très dangereusement avec le nanardesque (la scène des sirènes, d'une étonnante laideur), n'apparaît guère que comme le remplissage du pourtant deuxième film le plus long de la saga, on ne s'étonnera pas de voir un ennui - certes passager - pointer le bout de son nez, lorsqu'il s'agit de nous intéresser aux premiers émois amoureux des personnages, traités sur un mode trop léger pour paraître sérieux, mais trop premier degré pour que l'on soit vraiment censé en rire. On se retrouve donc avec un encart de vingt minutes (dans l'encart d'1h30) qui appesantit le rythme, développant un récit franchement dispensable autour du bal de fin d’année, à grands renforts de « je ne vais pas trouver de cavalière à inviter, c’est la catastrophe ! ». Certes, il nous offre une sympathique vision de la ravissante Emma Watson en grande robe de soirée (Histoire éterneeeeeelle, qu’on ne croit jamaiiiiis…), mais la magie du bal ne prend qu'à moitié, la superbe musique de Patrick Doyle cédant le pas à un rock dégénéré du plus mauvais effet.
Fort heureusement, fidèle à l'adage "in cauda venenum, le film de Newell garde tout son potentiel pour un acte final proche de la perfection, tant ses trois derniers quarts d'heure parviennent à captiver l'intérêt sans aucune relâche. Il faut dire que les séquences du labyrinthe, bien digne de son aîné Shining, sont si anxiogènes que l'on suspend irrémédiablement notre respiration jusqu'à son aboutissement.
Un aboutissement grandiose, qui nous fait enfin assister à l'étape tant attendue de
la résurrection de Voldemort,
la prestation hallucinée d’un Ralph Fiennes en grande forme faisant oublier qu'avant cela, il a fallu passer par une sorte de Hunger Games chez les sorciers, pas toujours déplaisant mais souvent hors-sujet.
Il n'empêche que, malgré une photographie qui commence à lorgner vers un grisâtre pas du meilleur effet, la magie fonctionne encore tant bien que mal, et heureusement souvent plutôt bien, d’autant que Patrick Doyle prend la relève de John Williams avec un vrai brio. Même s'il ne l'égale évidemment pas, il réussit à renouveler l'identité musicale de la saga en créant ses propres thèmes sans jamais s'emprisonner dans une redite peu inventive.
Ainsi, malgré quelques longueurs et mièvreries coupables, Harry Potter et la Coupe de feu n'en réussit pas moins à assurer sa part de spectacle pour que l'on puisse prendre un réel plaisir devant cet épisode, qui va crescendo jusqu'à un puissant point culminant de la saga, et annonce des suites qui s'avéreront brillantes... Car c'est maintenant que les choses vraiment sérieuses commencent !