--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au dix-huitième épisode de la sixième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :
https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :
https://www.senscritique.com/liste/The_Invisibles/2413896
Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---
Le constat est affligeant. Plus je m'obstine à regarder des films traitants d'invisibilité, plus je vois de mauvais films. Et c'est de pire en pire. Je suis tiraillée entre l'envie de mener ce cycle à son terme (je ne parle plus de "mois" maintenant que l'initiative a un an), et l'envie toute simple de ne plus m'infliger tant de souffrances de mon plein gré. Car "mois-monstre" ne rime pas, ne doit pas rimer, avec "mois-mauvais films". Ils peuvent être des dommages collatéraux, quelques embûches sur mon trajet, qui ne sont que plus intéressantes quand elles sont rares, mais pas la substance du programme, ce n'est ni agréable ni inspirant. En attendant de trouver une solution à mon dilemme, j'en reviens aux valeurs sûres : même si Harry Potter m'a récemment déçue dans l'adaptation d'un tome trois chéri, il n'en reste pas moins une source plus fiable que Disney Channel.
C'est donc renfrognée et dubitative que j'ai entamé le visionnage de ce quatrième volet des aventures du binoclard à la baguette magique, et souriante et béate que j'en suis sortie. Car malgré tous ses défauts, cette adaptation me laisse un sentiment de réussite bien plus probant que son petit frère. Pourquoi, c'est la question que je me pose encore. Car pourtant tout a régressé : des décors qui sont occultés par une avalanche de plans moyens, tous plus moyens les uns que les autres, à la photographie qui se contente d'imiter pâlement ses prédécesseurs, sans oublier feu la musique : après un John Williams au sommet de son art dans le troisième volet, on retrouve un pas de John Williams du tout. C'est quand même dommage de s'être débarrassé du génie pour l'épisode du chant de la sirène. La musique se contente donc de faire mollement pouet pouet pour les scènes d'actions et vaguement tiloulou pour les scènes tristes. Quel dommage.
Malgré une régression sur tous les postes, le film tient pourtant solidement la route. La faute à une œuvre originale indéniablement géniale (deuxième au classement juste derrière l'inégalable Prisonnier d'Azkaban. On ne reviendra d’ailleurs, sauf si le tome sept me surprend, jamais à un tel niveau), mais surtout à une intelligence dans l'adaptation qui me rappelle les deux premiers volumes. Tout est là, sauf les moments où Harry court dans les couloirs. Tout a été condensé habilement, repositionné dans le temps pour que les actions s'enchaînent de manière plus limpide, bref, la créativité de J.K.Rowling passé sous le rouleau de la discipline. Ajoutons à ça un Robert Pattinson au top, et une Emma Watson qui me laisse comprendre pourquoi tous les garçons de mon âge étaient (sont encore ?) amoureux d'elle, et on obtiendra un volet qui malgré ses défauts techniques, se défend plus que correctement, et laisse un sentiment de satisfaction, après deux heures quarante de divertissement (dans le sens le plus noble du terme. On ne s’ennuie pas une seule minute, on rit, on pleure, et c’est ça finalement le cinéma, permettre de vivre des émotions magiques dans un monde qui en a perdu le goût). Et ce malgré une fin qui s’est vue aseptisée de manière épouvantable. Eh les mecs, le principe de la saga était de grandir avec son lecteur, alors arrêtez de vouloir adresser vos films à des enfants de dix ans ! C'est fini l'innocence, on veut des démons hideusement difformes, des mains coupées dans la terreur et la souffrance, des moignons sanguinolents, la pire des douleurs infligée avec une cruauté froide… Qu’est devenue cette fin diaboliquement surprenante, qui a traumatisé toute une génération de pré-ados avide de sensations fortes ? Queudver a perdu de son égoïsme couard génial, pour devenir un Igor bête et discipliné, et on a l'impression d'assister à la réunion annuelle d'une secte un peu nulle, avec un gourou qui n'est que moyennement charismatique. Daniel Radcliffe se tortille grotesquement par terre, laissant supposer que finalement, « Endoloris » est peut être la formule magique de l'attaque de guillis, et Robert, pauvre de lui, laisse envisager le pire : J.K. Rowling n'a jamais su écrire avec beaucoup de succès les morts de ses personnages même les plus attachants, et visiblement, les films n'ont pas l'air de savoir mieux s'y prendre...
La thématique de l’épouvante et de l’horrifique semble disparaître peu à peu du cycle, tout comme, j’en ai bien peur, le thème de l’invisibilité. On a encore le droit à de la cape d’invisibilité c’est vrai, mais franchement elle devient plus un accessoire de mode qu’un réel levier narratif ou vecteur fantastique. Harry la met quand elle n’est pas utile, et la retire quand elle pourrait le devenir, et le film se rendant compte de l’absurdité de la chose, vise à faire disparaître la cape d’invisibilité (trop méta). Car il est vrai que 80% des intrigues de la saga reposent sur Harry faisant le filou dans les couloirs tard le soir, et que sans le suspens de savoir s’il va se faire surprendre (par Rogue de préférence, qui visiblement aime lui aussi faire le filou dans les couloirs), l’intrigue, justement, n’est plus si intrigante. Finalement, J.K. Rowling semble s’être encombrée d’un accessoire trop puissant qui la gène dans sa narration plus qu’autre chose. Et si elle parvient à cacher cette misère sous le tapis en glissant des détails de maladresse (“oups j’ai oublié ma cape dans le dortoir lol”), les films, qui ne s’encombrent pas de fanfreluches, vont finalement devoir finir par occulter complètement l’outil, et tant pis pour l’effet d’image froissée si jolie et si fantaisiste, et tant pis pour la symbolique de l’objet ayant appartenu au père (mais rassurons nous, les patronus arrivent pour compenser cette perte).