Planante, transcendante, mystique, éthérée, immatérielle, envoûtante... Les qualificatifs ne manquent pas pour tenter de décrire la musique de Sigur Rós. Une chose est sûre, elle représente une invitation au voyage. Presque une initiation.
Heima est une ode à la musique, la vraie. Loin du star system, des paillettes, ou des contrats ("desk job" selon l'un des membres du groupe), il raconte l'épopée de Sigur Rós à travers l'Islande, leur pays d'origine, pour une série de concerts ayant pour but de remercier leur public ("giving back").
Gratuits, non-annoncés, sans promotion. Sigur Rós sillonne ce pays magnifique pour produire des live plus ahurissants les uns que les autres, que ce soit par leur conception ou par la musique jouée.
Durant ce retour aux sources, il n'est pas question de salles de concerts, de lives monumentaux. Simplement de musique. D'un groupe qui organise des concerts surprises, dans de minuscules villages, en rase campagne, dans une usine désaffectée d'un ancien port de pêche aujourd'hui désert, au milieu d'une forêt, près d'un barrage...
Sigur Rós se produit dans la nature, au cours d'un retour aux sources salvateur. L'humilité de cette démarche est renvoyée par un public toujours présent, toujours ému. Un public qui se déplace en masse pour cet évènement. Il n'est probablement rien de plus beau pour qui aime la musique que de voir cette osmose, cette réunion entre un groupe et son public.
Parsemé d'interviews des membres du groupe, le documentaire nous laisse frappés par leur modestie, leur sympathie. Leur normalité, même si ce mot ne veut pas dire grand-chose. Dans la société actuelle, ils seraient même plutôt des exceptions parmi les musiciens. Combien organiseraient de tels concerts gratuits ? Combien construiraient un marimba (sorte de xylophone) avec des pierres trouvées dans la nature ?
Ce documentaire dégage quelque chose de vrai dans son approche. Le retour à la terre, à sa terre, d'un groupe si aérien. Le retour aux grands espaces islandais, magnifiques. Le vent, la terre, l'eau... Les éléments comme le public semblent saluer le retour de ce groupe sur ses terres.
La beauté de cette initiative rappelle les fondements de la musique. De celle qui vient du coeur, et qui touche le coeur. Quand les mots ne suffisent plus à décrire les émotions.
Elle montre aussi la cohésion d'un groupe, et rappelle qu'avant d'être un produit marketing, un groupe de musique est une bande de potes, heureux simplement d'être ensemble pour jouer de la musique, sans avoir besoin de parler.
Seul moment de tension, une carcasse d'avion écrasée au milieu d'une plaine. Peut-être pour montrer qu'en cas de retour à la terre la nature reprend ses droits. Peut-être pour montrer que la modernité n'a pas sa place dans cette démarche.
En tout cas, cette carcasse nous laisse un regret : si la musique de Sigur Rós passait dans l'avion au moment où les moteurs se sont arrêtés, sans doute serait-il encore en train de planer.