El Raseur
Nouvelle entrée dans la trop longue saga d'horreur Hellraiser qui (comme la plupart de ses homologues) ne compte que deux opus dignes d'intérêt. Ne tournons pas autour du pot: l'épisode du jour n'a...
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le 9 oct. 2022
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Après des décennies de faux départ (dont l'un concernant le duo français de A L'Intérieur soit Julien Amaury et Alexandre Bustillo, remerciés dans les end credits), voici venu le fameux reboot d'Hellraiser.
Qu'est-ce qu'Hellraiser pour ceux qui ne connaissent pas encore ?
Basé sur la nouvelle The Hellbound Heart de Clive Barker, Hellraiser devient un film réalisé par son propre créateur en 1987, film au budget riquiqui mais avec un visuel insurpassable.
La Lemerchant Lament (puzzle box cubique à géométrie variable) est en fait une clé permettant d'ouvrir les portes de l'Enfer où règne le dieu Leviathan et donnant passage à ses émissaires, les Cenobites.
Franck est un homme recherchant le plaisir dans la douleur et lorsqu'il rentre en possession de la puzzle box, il obtient ce qu'il voulait: la souffrance éternelle et se voit déchiré de toutes parts par des chaines sorties de nulle part...
Sa maitresse Julia se doit de ramener des hommes dans le grenier pour redonner forme au corps torturé de son amant, entrainant dans son sillage le Hell Priest - leader de la secte Order of the Gash tout de cuir vêtu dont la tête est parsemé de clous géants (plus connu sous le sobriquet de Pinhead) - et ses disciples, au physique tout aussi étrange mais inoubliable...
Barker donnera à son film une ambiance poisseuse et glauque inoubliable, donnant sa préférence au couple Franck/Julia plutôt qu'à l'innocente Kirsty dans une débauche d'imagerie S-M teintée d'un gore jusqu'au boutiste...où le plaisir de la souffrance dépasse la souffrance dans le plaisir...
...et tout ça d'être balayé en un coup dans ce reboot ayant subi lui aussi le devellopment hell, ô combien est-ce ironique, non ?
En effet, après une multitude de séquelles s'amoindrissant proportionnellement à leurs chiffres accolés (excepté le second qui va bien plus loin que son modèle), Hellraiser et Barker son créateur parcoururent un chemin torturé entre 2006 et 2019 pour remettre les choses à plat et tenter de redorer le blason de cette franchise devenu un vrai calvaire à voir (était-ce la volonté de Leviathan ?)...
Comme cité en début de texte, le duo responsable de l'extrême A L'Intérieur (soit le meilleur horror-flick français) s'est vu offrir le projet sur un plateau mais le scénario final ne plut pas à Miramax (propriétaire des droits depuis le quatrième film) et au revoir les Frenchies (qui auront leurs propres chemin de croix à parcourir en enfilant les projets de plus en plus mauvais pour aboutir au truc The Deep House en passant par le vilain reboot Leatherface en 2017).
D'autres cinéastes et scénaristes se succèderont (dont Pascal Laugier, autre Frenchy ayant traversé l'atlantique pour pas grand chose au final) sur le projet jusqu'à ce que finalement David Goyer écrive le premier jet de ce reboot (scénariste de Blade I et II puis Batman Begins pour le meilleur, mais aussi du vilain Ghost rider: Spirit of the Vengeance et de l'horrible Terminator: Dark Fate pour le pire !) , puis soit réecrit à quatre mains par Ben Collins et Luke Piotrowski, duo de scénaristes responsables de deux films que j'ai pas encore vu (mais qui me semblent intéressants, on verra ça plus tard...).
Qu'en est-il du film ?
Alors voilà...
On va dire que ce reboot mérite bien son nom car exceptés Hell Priest (Pinhead) et Chatterer (le Cenobite qui claque des dents de longue) et évidemment la puzzle box, tout le reste est nouveau matériel.
Un bon point, donc...
La photo du film est très classe et la grande demeure (même si elle rappelle un peu la maison Hewitt du remake de The Texas Chainsaw Massacre by Marcus Nispel en 2003) cerclée de son coffrage métaliique fait son petit effet.
La musique de Ben Lovett est fonctionnelle mais devient plus intéressante lorsqu'elle se pare des notes de Christopher Young (le compositeur hsitorique de la saga sur les deux premiers épisodes et ayant créée le thème baroque reconnaissable entre mille), nous rappelant que l'on regarde un Hellraiser...
Et oui, parce que sous ses atours classieux (il y a du budget par rapportaux films antérieurs et ça se voit, magré le fait qu'ils aient tourné en Serbie) et son image léchée, ce reboot ne raconte rien d'intéressant:
-
le millionaire Serbe Roland Voight achète la puzzle box, l'ouvre pour assouvir ses appétits (mais lesquels, ce n'est aps vraiment développé, ici...) et puis le cube sera dérobé plus tard...pour finalement retourner dans les mains de Voight qui pourra accéder une seconde fois (?) à une audience avec Leviathan pour...se libérer de sa souffrance qu'il a lui-même initié
...
Bref, des choses déjà vues morcelées dans chaque épisodes de la franchise étalée sur 24 ans entre 1987 et 2011...
Le personnage principal est interprétée par l'anti-charismatique Odessa A'zion (que je ne connaissais pas avant ça et qui a joué dans d'autres trucs que je n'ai du coup pas envie de voir) et plombe le film par...son manque de charisme !
Alors, c'est plus subjectif qu'objectif mais même l'écriture de ce perso m'est antipathique et
le fait d'en faire une ancienne alcoolique et droguée en rémission
n'apporte strictement rien au récit !
Les autres protagonistes ne sont guère mieux lotis (on va dire que Trevor et Voight sont les moins loupés) et donc, ça commence pas fort !
D'ailleurs, le film fait de même et traine en longueur en nous exposant en toile de fond la love-story d'un couple de gay inintéressant (mais au moins pas stéréotypé, c'est déjà ça) et..;et rien d'autre, puisque le film est un peu vide de ce côté là...
On est donc loin de la dynamique perverse du couple Frank/Julia du film originel et ici, les choses sont classes...et lisses.
C'est le problème principal d'un film voulant réinventer Hellraiser en utilisant le côté visuel arty à la Suspiria by Guadagnino (qui lui, réussissait eu moins sur tous les fronts !) et en essayant de se la jouer "Rated R" avec quelques discrets effets gore bien policés.
Bien sûr, les Cenobites ont aussi été réinventés et pourquoi pas, mais ils ont l'air si clean dans leurs cosplays soignées...
Merde, Pinhead version Barker / Doug Bradley en imposait avec sa tenue S-M et son phrasé particulier (le leitmotiv-même de la nouvelle et des films qui suivirent) tout comme le terrifiant Chatterer et son visage torturé, le massif et visqueux Butterball, la troublante Female Cenobite...
Ils avaient tous un côté organique alors qu'ici, les Cenobites sont devenus bien proprets (leur design restant intéressant mais trop sage) et well, on ne ressent ni les promesses de souffrances ni même le danger de tomber entre leurs doigts vicieux.
Et plus que les autres, Hell Priest/ Pinhead a vraiment peu d'attrait ici car encore une fois trop lumineuse et...lisse !
Chez Barker, ces pauvres êtres pervers étaient prisonniers de leurs propres désirs alors qu'ici, ils ont juste l'air de sidekicks unidimensionnels.
Mais surtout, le dyptique Hellraiser / Hellbound (à partir du III, ça devient un peu trop "Freddyesque", si vous voyez ce que je veux dire...) bénéficiait d'une atmosphère poisseuse dégoulinante de stupres et de perversion et malgré le manque de moyen, on eut droit à un visuel très fouillé des sévices étalés sur l'écran et cet inconvénient n'influa nullement sur la description-même de cette souffrance/plaisir: remember **
Frank** au début du premier transpirant d'excitation en tentant d'ouvir la puzzle-box
ou plus encore, l'inoubliable (et insoutenable en version Uncut) séquence d'Hellbound
où le patient qui - persuadé d'avoir des asticots sous la peau - se taillade les avants-bras sans même un moment d'hésitation et se vide de son sang sur le matelas, permettant ainsi à Julia de réapparaitre totalement écorchée avant de fôlatrer avec Channard qui lui, la fourni en viande fraîche...comme Julia le fit pour Franck dans le passé, bouclant ainsi la boucle
...
Ça, c'est Hellraiser !
Mais les responsables de ce reboot - y compris un Barker peut-être devenu trop soft avec l'âge - s'évertue à donner un visuel classe et froid alors qu'il n'y a que le visuel glauque et sanguin qui sied à cet univers...
Techniquement très joli, ce Hellraiser cuvée 2022 passe à côté de son concept et ne nous offre qu'une horreur soft diluée dans un vide scénaristique évacuant l'odeur putride de la mort et les sévices éternels de ceux qui ont eu l'impudence de jouer avec la puzzle box...
La phrase qui définit le mieux le vrai Hellraiser est:
https://www.youtube.com/watch?v=AbfDWnN6u_o
'"YOUR SUFFERING WILL BE LEGENDARY, EVEN IN HELL!!!"
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Créée
le 9 oct. 2022
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