Les nouvelles formes de beauté intérieure..
Dans un futur proche, où Internet est consultable directement par la pensée, où l'interaction par mails ou sur chat s'opère dans l'immédiat avec la validation vocale pour seul filtre, sans la moindre action manuelle : un homme installe son nouveau système d'exploitation. Il lui choisit une voix, guidé par le souvenir de sa quasi ex-femme (les papiers du divorce traînent, des deux côtés) et découvre une personne à part. Tout en restant aux ordres, la voix affirme et développe sans cesse son individualité, avec ses propres préoccupations, ses sentiments également. Une histoire d'amour naît.
Spike Jonze est un cinéaste à idées, il l'a déjà démontré avec le génial Dans la peau de John Malkovich. Du haut des gratte-ciels, des lumières naturelles : et la Nature justement, partout, fait irruption dans une mégalopole trop pleine, trop construite, saturée. Malgré son appartenance à la SF, Her utilise très peu d'effets spéciaux et nous présente un monde de demain dans la continuité de ce que nous connaissons, avec quelques originalités de forme. Le génie de Spike Jonze est de nous immiscer dans une certaine banalité. Nous sommes avec l'homme du quotidien, dans une ou deux décennies devant nous.
Her se partage entre enthousiasme et dépression devant ce nouvel équilibre, où l'Humanité s'étend en même temps qu'un sentiment de vide infini. Cette comédie romantique audacieuse signe l'éternel retour de la difficulté à sortir de soi. L'époque, le contexte, la technologie, modifient la surface et la pratique, mais les mêmes désirs et malaises s'étendent. C'est une nouvelle variante de l'amour, la révolution se trouve dans son expression, celle-ci a liquidé la sensualité.
Humble et visionnaire, Her regarde notre avenir sans prophéties de malheur, en anticipant un espace-monde consumériste, douillet, limpide. Un espace pacifié où les frustrations se taisent et peuvent se régler rationnellement. Dans la mesure des effets de l'abondant catalogue de corrections superficielles à disposition.