Imaginez une majestueuse maison, solidement plantée au milieu des bois. À côté, le rêve de tout gosse : une cabane construite dans les arbres. Charlie (Milly Shapiro), ado étrange au visage assorti, aime s'y réfugier. Le matin de l'enterrement de sa grand-mère, c'est là que son père la trouve. Quelques jours plus tard, la tombe de la vieille dame est retrouvée profanée, marquant le début d'une lente descente aux enfers pour le reste de la famille...

Difficile de creuser davantage le scénario sans trop en dire, car l'intrigue d'Hérédité prend vite un tour dramatique stupéfiant, avant de dériver vers un surnaturel assumé jusqu'au final à couper le souffle. De quoi vous rendre un peu hagard à la sortie du cinéma, la démarche moyennement assurée et le cœur en mode tambour. Une chose est sûre, Ari Aster, qui signe ici son premier long métrage, a tout du petit prodige.

Parmi les multiples idées de mise en scène : le parallèle troublant entre les décors miniatures ultra réalistes conçus par la mère (Toni Collette, totalement investie) et la navigation distante en travelling d'une pièce à l'autre de la demeure familiale qui, du coup, prend des airs de maison de poupées où s'agitent de pauvres créatures privées de leur libre-arbitre. Brillant ! Les mouvements de caméras, toujours judicieusement orchestrés autour des personnages, démontrent un grand sens de espace et de la composition.

Baigné dans une atmosphère pesante mais immersive, avec la déliquescence d'une famille en fil rouge, le film ne dégaine ses cartouches purement horrifiques qu'à de rares et redoutables occasions. Moins original que les fameux It Follows et Get Out, Hérédité enterre pourtant 95% de ses contemporains en refusant la facilité. Ici, pas de jump scares miteux, de psychologie de comptoir ou d'explicitation outrancière du paranormal. Aster s'inscrit plutôt dans la veine d'un Polanski ou d'un Friedkin (y'a pire comme références). En tout cas, le cinéma à frissons malin et percutant a clairement de belles années devant lui... Franchement, chapeau.

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le 14 juin 2018

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Arthur Bayon

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