S'il est intéressant de se pencher sur la genèse de Highlander 2, il l'est beaucoup moins de revenir sur celle de Highlander 3. En 1995, la franchise Highlander n'est pas des mieux portantes. Décrédibilisée par l'échec critique et public d'Highlander Le Retour, la saga vient de se décliner sur petit écran à travers une série-reboot consacrée à la mythologie des immortels. Les producteurs ayant déserté la franchise depuis la production chaotique du second opus en Argentine, ce sont des investisseurs essentiellement français et canadiens qui en rachètent les droits et mettent très vite sur les rails la production d'un troisième opus, consacré au retour de sa star Christophe Lambert. Ce dernier aligne alors les succès publics à l'écran en alternant les productions françaises (Max et Jérémie) et internationales (Face à face, Fortress), même si la qualité de sa filmographie va déjà en déclinant. S'il avait clairement critiqué la production du film Highlander 2, l'acteur accepte néanmoins de participer à ce troisième film, y voyant probablement là la possibilité de rattraper l'échec critique du précédent opus et le désamour des fans de la franchise. Hors de question cependant de rappeler Sean Connery comme pour Highlander 2, son personnage étant mort par deux fois et l'acteur écossais négociant alors des cachets beaucoup trop élevés. Peu enclin à revenir à cet univers après ce qu'il a vécu sur le précédent film, Russell Mulcahy cède volontiers son fauteuil de réalisateur à l'inconnu Andrew Morahan qui partage avec son prédécesseur un passé de vidéoclippeur. Sorti en 1995, Highlander 3 The Sorcerer renfloue les caisses de ses investisseurs et lance définitivement sa star sur la voie du cinéma Z.
Le film s'ouvre sur une page de l'histoire de Connor McLeod. Au 16ème siècle, ce dernier garde le cheveu long et suit au Japon l'enseignement du maître de Ramirez, le sage Nakano (le vieux Mako dans son rôle habituel de faire-valoir). Kane, un guerrier mongol un peu cintré, à la recherche de McLeod, l'y retrouve et parvient à tuer Nakano et à lui voler son pouvoir. Mais le quickening qui s'ensuit fait s'effondrer la grotte où ils étaient, ensevelissant Kane et deux de ses alliés immortels, sous les rires sardoniques du vieux sorcier pourtant décapité. Quatre siècles plus tard, des fouilles archéologiques permettent à Kane de s'évader de sa prison. N'ayant rien d'autre à faire de son temps, il se lance alors à la recherche de McLeod. Ce dernier, qui vit désormais à Marrakech avec son fils adoptif John, pressent le retour de son vieil ennemi et choisit de retourner à New York.
La difficulté était ici de faire suite au premier film, tout en ignorant les perspectives futuristes du second opus. Quelques éléments (l'évocation de Ramirez et de Brenda, et un bref flash-back sur le Kurgan) nous permettent de situer Highlander 3 dans la continuité du film initial de Mulcahy sans pour autant donner l'impression de vraiment lui faire suite. Car Highlander 3 est finalement plus un remake du premier opus qu'une continuité véritable, le scénario ne faisant que dupliquer une bonne partie du schéma narratif du film de Mulcahy en remplaçant simplement les personnages par d'autres (Brenda est remplacée par Alex, le lieutenant Stenn relève l'inspecteur Bedsoe et Kane n'est qu'un simili-Kurgan) et en troquant les origines écossaises de McLeod pour un épisode de sa vie en France durant la Révolution. Rien de nouveau donc niveau intrigue, McLeod est à nouveau confronté à un ennemi sanguinaire et visiblement demeuré, s'entiche d'une scientifique qui tombe rapidement amoureuse de lui (une constante dans la saga) et doit finalement sauver son fils, enlevé par le bad guy métamorphe (le T-1000 de T2 venait de passer par là). Lambert semble croire à la réussite du projet et enrichit son jeu de trois nouvelles expressions (la compassion, l'inquiétude et la stupéfaction), érigeant du même coup son personnage au panthéon des figures sophocléennes. La star française y retrouve son ami, le grand Mario Van Peebles, avec qui il avait déjà partagé l'affiche un an auparavant dans le huit fois primé aux oscars Deux doigts sur la gâchette. Impressionnant de dangerosité perverse, l'acteur afro-américain compose ici un rôle de bad guy d'anthologie, grimaçant autant que Jim Carrey dans The Mask et tirant plus de fois la langue que Donald Trump à un meeting des Nations Unies. C'est bien simple, à côté de lui Clancy Brown en Kurgan fait figure de petit canaillou des steppes. Deborah Kara Unger, elle, se demande un peu ce qu'elle fout là à jouer l'incontournable fille à sauver, et tire même un peu la gueule quand son personnage cède au charme, pourtant irrésistible, de ce taquin de Highlander. S'ensuit la scène la plus chaude de la filmographie de Lambert et une formidable tentative de répondre à la mode des thrillers érotiques des 90's (Sliver, Basic Instinct), filmée avec grâce et plus d'inspiration que tout le restant du film. Ultime pirouette d'un scénario plus inventif qu'on voudrait le croire, ce ne sera pas la nouvelle copine de McLeod qui se fera enlever (faudrait pas non plus que ça ressemble trop au premier film) mais son fils adoptif. Le Highlander se voit alors obligé de revenir aux states croiser le fer avec son vieil ennemi dans une fonderie évoquant celle du final de T2. Tout se passe alors comme prévu : le vilain sadique perd la tête, McLeod se prend deux trois décharges magiques et le film se boucle sur une improbable trinité familiale, partie arpenter le Maroc à dos de chameau.
Il y a quelque-chose de profondément ennuyeux dans Highlander 3, le sentiment de revoir le premier film sans ses qualités. Le scénario reste prévisible de bout en bout et semble n'avoir été écrit que pour répondre aux attentes des déçus du second film. La réalisation de Morahan n'a rien de très inspirée, le gonze filmant son film comme un long clip de 90 minutes, usant et abusant de plans inclinés et d'un montage épileptique, sans jamais se démarquer de ce qu'avait pu expérimenter son prédécesseur. Reste quelques belles images, notamment lors de cet interlude écossais, bercé par la reprise de Bonny Portmore par Loreena McKennitt. Et quelques moments purement nanardesques, comme la duplication magique de Mako et du grand Mario, digne du final de Double Dragon. Sans oublier la très belle affiche millénariste du film, qui donnerait presque envie à elle-seule de ré-apprécier le navet.