10 plans = 10 tranches de vies du quartier populaire et dangereux de Hillbrow à Johannesburg. C’est le parti pris simple mais percutant qu’a choisi le français Nicolas Boone pour raconter son histoire, proche du documentaire dans sa forme mais s’inspirant surtout du Elephant d’Alan Clarke, court-métrage de 1989 fonctionnant sur le même principe.
Ici, le plan-séquence participe surtout à une radicalisation du procédé : pas de montage, pas d’ajouts sonores et peu de dialogues qui ne sont d’ailleurs jamais sous-titrés. La caméra n’est là qu’en témoin, ne cherche pas à faire comprendre quelque chose au spectateur, ainsi seule l’action dans le cadre provoque l’émotion. Une émotion du réel, brute et inaccessible, percutante car extrêmement proche des individus.
Le spectateur assiste par exemple à un terrifiant braquage d’un cinéma, impuissant face à la violence des braqueurs que la caméra suit à la trace. Mais il assiste aussi à des moments de vie plus nuancés, parfois imprégnés d’une certaine poésie par leur mélange de violence et de solidarité. Par l’irruption de la drôlerie du quotidien aussi, comme ce duel de pompes entre deux pompiers aperçus en arrière-plan par un voleur à l’étalage.
Hillbrow, par la longueur de ses plans et son procédé empêchant toute empathie, est déstabilisant. Choquant peut-être, pour certains. Mais il surprend assurément par la cohérence et la maîtrise de sa mise en scène, son ton radical et, quelque part, sa beauté.