Himizu
7.4
Himizu

Film de Sion Sono (2011)

Himizu, s’avère être le film de Sion Sono qui m’aura le plus marqué.
Son premier film Cold fish qui revisite l’histoire du couple de serial killers Sekine Gen et Hiroko Kazama, pour croiser l’explosion de la cellule familiale, le rôle de l'homme, de la famille et en filigrane de la jeunesse, était excessive d’effets gore et de longueurs. Oscillant entre film d'horreur et l’étude du comportement humain dans ce qu'il a de plus négatif pour traiter de la descente aux enfers d'un homme faible, se révélant dans l'horreur, m’a laissé perplexe.
Viendra ensuite The land of hope qui m’a permis de me réconcilier même si encore une fois quelques longueurs et des excès de jeux peuvent être gênants. Une situation absurde de quarantaine pour nous parler d’une catastrophe nucléaire et du choix des uns et des autres. Un film doté de beaux instants.


On retrouve dans Himizu ces deux thèmes, même si le cinéaste transpose le manga de Minoru FURUYA, il propose une ambiance apocalyptique nous rappelant à la catastrophe de 2011 et révèle une intrigue assez sombre de l’adolescence, plaçant l’idée de suicide et de mort comme seul échappatoire à des familles violentes, des institutions scolaires en plein fantasme, essayant de redorer l’image du peuple japonais, face à des écoliers perdus.


Simida, jeune homme de 15 ans, vit au bord d'un lac où quelques vestiges du tsunami subsistent pour rappeler encore à la réalité. Une mère absente et un père violent, le laissant livré à lui-même pour s’occuper de la petite location des bateaux... à des touristes absents. Une métaphore de reconstruction pour ce jeune homme solitaire et mutique, qui se veut ordinaire, en prise avec une société japonaise ravagée par la catastrophe et qui devra elle aussi se reconstruire, prônant le "collectif".


L’introduction nous plonge directement dans un Japon détruit par des images de délabrement et de misère, des plans longs et silencieux, accompagnés seulement de musique, comme souvent répétitive, mélangeant les sons de tempête qui martèlent les scènes, et de poème, cherchant justement la poésie là où elle est désormais absente. Un cheminement nous laissant apprécier une narration parfaite qui nous dirige avec quelques fausses pistes, mélangeant les temporalités. Car si la violence est bien présente et redondante, il s'agit plutôt d'un récit qui mélangent les tons, parfois comique ou dramatique, irritant ou émouvant, croisant des instants de solidarité et d’humour au milieu du marasme, jouant de sa caméra et de ses plans qui dynamisent une ambiance finalement assez lente par des arrêts sur image emprunts de mélancolie.
Une belle idée, de beaux sentiments et une violence parfois abrupte qui n’en finit pas. Cela réserve tout de même quelques scènes prenantes et fortes en tension, notamment la décision de Simida face à son père, ou encore son fantasme rêvé de combat face aux mafieux, qui pointe l’optimisme.
Ce film possède un attrait indéniable.


Le seul bémol viendra encore une fois de longueurs notamment en milieu d’intrigue où tout ce déferlement de violence et d’incapacité finit par stresser véritablement et procure un certain malaise. Tout comme ce jeu de « gifles » que Shazawa (Fumi Nikaido), elle-même propose à Simida : les coups constants en lieu et place de communication, vient comme un effet miroir au harcèlement de violence, moral et financier que le jeune homme subit de la part de son père, endetté.
Et il est assez marquant de voir dans la caractéristique même de cette jeune fille qui agit de la même façon que le maître d’école, appuyant sur les responsabilités jusqu’à créer l’overdose avec toutes ses bonnes intentions, le rapport à la notion de victime un jour, victime toujours, validée par le poids de la société. C’est assez prenant pour laisser place au suspense en s’interrogeant finalement sur la décision que finira par prendre Simida (?). Le metteur en scène choisit son final, à chacun d’y voir réellement la portée.


Shôta Sometani (Simida) est à lui seul la révélation de ce film. Accompagné de quelques laissés pour compte qui squattent sur son terrain, il deviendra la raison de vivre de la jeune écolière Shazawa qui décidera de le sauver de lui-même, cherchant elle aussi un échappatoire à une cellule familiale sordide. Des seconds rôles bien choisis (Tetsu Watanabe, Mitsuru Fukikoshi Cold Fish), homme perdus, petits malfrats sympathiques, Yacusas peu commodes, soutiens inattendus, où tous finiront par s’aider les uns les autres. Même si parfois quelques instants de grâce se font sentir, les acteurs sont souvent dans l’excès ou la figuration, notamment Fumi Nikaido, qui fatigue par ses multiples cris et pleurs et renvoie à l’image des autres personnages féminins, qui viennent complèter une piètre image de la femme, alors que le metteur en scène nous livre avec une certaine force toutes ses préoccupations.

limma
7
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le 27 août 2017

Critique lue 590 fois

5 j'aime

limma

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