La critique.
Marianna Otero part du mythe du photographe à l'instant décisif et déconstruit. Vue après vue, elle retrace le parcours d'un faiseur qui périgrine, insiste et construit patiemment les images d'un récit par le reportage. Patiente, elle l'est aussi pour façonner par touches; avec son propre parcours, avec la rencontre de photographiés où de proches de Gilles, une histoire par échos. Romancer c'est l'art de faire humanité avec les aléas d'une trace, d'une histoire et d'une époque. C'est ce que tente avec modestie ce documentaire en insuflant un peu de nous pour donner vie à un brin d'homme entre les trous de pellicules à trente-sept vues.
Merci


L'élucubration.
La subjectivité est la tarte à la crème de notre époque. Apres un voyage on ne parle plus d'un pays au bout du monde. On raconte son aventure, ses rencontres, son corps selfisé à travers un monde instagramé. Aussi bien pour un voyage que lorsqu'on communique ou mange un Ferrero tout est experience personelle et lieu d'affirmation de son identité.Je suis journaliste et dans mon métier la mise en scène de soi est une norme d'écriture de plus en plus écrasante en reportage. C'est le mouvement des deux derniers siècles, la montée en puissance toujours plus dévorante et capitalisée de l'individu.
Loin de moi l'idée de regretter un temps ancien, objectif, à l'universalité occidentale et dominatrice. Mais il y a un loup quand l'effet de subjectivité est systématique, quand il réduit le champ des possibles pour raconter. Quand il devient une nouvelle norme qui uniformise. Quand mon insta et le tien disent la même chose. Qu'ils racontent finalement le même besoin de réduire le différent à ce que l'on connait déjà.


C'est exactement ce dont tente de se prémunir Histoire d'un regard. Dès le début Marianna Otero nous partage l'intimité de cette reconstruction avec ses défauts et ses doutes. Elle assume pleinement l'impossible saisissement final de la vie de Gilles Caron pour faire vivre une poétique de l'évocation entre les disparus et nous, les vivants !

Lalaitou
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le 7 févr. 2020

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