Aussi méconnue et anecdotique soit-elle cette première réalisation de Bertrand Blier possède au moins le mérite de témoigner d'une époque aujourd'hui révolue, ce qui en fait d'une certaine façon un document historique digne d'intérêts. Tourné au début des années 60 ce documentaire montre une génération d'après-guerre en plein devenir, préoccupée par des questions aussi diverses que la famille, l'insertion professionnelle, le rapport au sexe opposé ou encore la place du jeune adulte au coeur de la société française.
Bertrand Blier rapproche devant la caméra une dizaine d'individus des deux sexes pour former une sorte de révélateur social, filmant une parole placée sous le signe de la spontanéité. Proche du docu-fiction ce premier long métrage fait montre d'une jolie liberté de ton, inégal dans son rythme et son intérêt mais foncièrement original et particulièrement moderne compte tenu des productions cinématographiques contemporaines : en effet si la Nouvelle Vague française a d'ores et déjà délivré quelques films majeurs l'heure est encore au cinéma de papa, à savoir au conformisme des studios et à l'écriture préconçue. Blier apporte alors un souffle nouveau dans le paysage du Septième Art en filmant sur un même pied d'égalité le jeune prolo et le jeune bourgeois, le jeune homme et la jeune femme, mettant un point d'honneur à privilégier le discours à la forme, la fraîcheur à l'artifice.
Un geste de cinéma suffisamment libre pour susciter la sympathie et l'adhésion, pas toujours passionnant car souvent proche du quotidien et de l'anodin mais résolument moderne et audacieux de surcroît. Une curiosité à découvrir, finalement assez surprenante de la part du célèbre dialoguiste des Valseuses et de Buffet Froid...