Retour à la terre
Histoire d'un aller simple, Hostiles s'impose comme une ode au genre western qu'il investit, qu'il anime, qu'il magnifie. Scott Cooper a tout d'un grand et continue de questionner, tout au long de sa...
le 14 mars 2018
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Il est dit que les paysages façonnent le caractère des hommes. Si l’on songe aux vastes étendues sauvages de ce qui est devenu l’Amérique, on pense aux déserts arides ainsi qu’aux forêts denses. Dans les deux cas, les hommes semblent tels fourmis face à l’immensité des espaces et deviennent, par la force des choses, « Hostiles ».
Dès les premières images du film, la nature prend tout l’espace, l’homme et ses réalisations semblent bien minuscules, comme écrasés et pétrit par la force de dame Nature.
Masanobu Takayanagi filme en lumière naturelle et délivre de superbes images qui oscillent entre la clarté âpre du soleil et les nuits sombres et pluvieuses. En lieu et place de la démonstration visuelle, il installe une apparente simplicité (aux cadrages très travaillés) qui sied à merveille pour porter l’intensité des paysages à l’écran. Cette emprunte visuelle, véritable ode à la nature, est secondée par la sublime musique de Max Richter qui sait se faire rare et tout autant pertinente.
De la séquence d’introduction, jusqu’à la fin du périple, Scott Cooper impose une tension omniprésente qui n’est entrecoupée que par le rythme volontairement lent de cette excursion à cheval.
Tout en retenue, ces hommes, qu’ils soient Améridiens ou « civilisés » sont, au final, tous sauvages, portés par la conquête ou la préservation de leurs terres et doivent suivre les ordres, souvent contestables de leurs chefs ou de leur président (rien n’a changé depuis !).
Le mutisme des hommes de l’époque est superbement porté à l‘écran par des acteurs, tous excellent dans leur retenue, à l’image des 2 chefs de file, Christian Bale et Wes Studi.
Les femmes, ne sont pas en reste et même si elles en prennent pour leur grade, elles parviennent, par petites touches, à apporter un peu de douceur fort bienvenue dans ce monde de brutes. Rosamund Pike nous livre de bien belles et touchantes performances (surtout dans le registre de la douleur).
Les costumes sont absolument remarquables et travaillés dans les moindres détails, la reconstitution d’époque est minutieuse et mérite, elle aussi, bien des récompenses.
Empreint d’une profonde humanité, ce voyage dans le temps totalement lyrique nous plonge dans les abysses du regret, de la rédemption et des conflits intérieurs. Ces destins croisés d’une autre époque résonnent fortement sur notre présent : traitement et considération des prisonniers ennemis, horreurs de la guerre et obligations des soldats de réaliser l’ignominie sans broncher puis vivre avec un immense poids sur la conscience… Sans oublier les politiques migratoires des exclus par des conflits.
La scène de fin est totalement bouleversante, certaines scènes vous percent telle une balle de colt 45 tirée à bout portant, d’autres vous scalpent en plein vol et, fort heureusement, il subsiste çà et là des scènes d’une incroyable douceur (ne pas manquer celle sous la tente).
Ce petit chef d’œuvre, qui évite bien des caricatures d’un genre tombé en désuétude, marque très lentement, au fer rouge et pourtant, on en redemande.
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Créée
le 19 mars 2018
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