Le but de ce documentaire est simple : dénoncer ! Dénoncer les pratiques du milieu du porno amateur démocratisé par le support internet, une industrie qui rapporte un max il faut dire, d’où la question : à qui profite le sexe dans ce marché triangulaire "exploitant - exécutant - consommateur" ? Chacun a ses avantages mais un seul à ses contraintes, l’exécutant, et c’est sur ce point que Hot Girls Wanted va appuyer ...
Je ne sais pas si on pourrait parler d’une véritable enquête d’investigation, disons plutôt un reportage où l’on va suivre principalement le parcours de Tressa (aka Stella May), jeune redneck de 19 ans, qui après avoir abandonnée ses études et divers petits boulots se lance dans le porno amateur. Déjà la première chose qui m’a quelque peu interpellé c’est le fait que le docu ne s’attarde pas sur la réelle et sincère motivation de cette fille à se lancer là dedans, car elle certifie qu’elle croyait que l’employeur cherchait un mannequin sexy pour ne se rendre compte une fois dans l’avion qu’il s’agissait de porno, donc est-elle profondément naïve ou malhonnête ? Car le principe des réalisatrices est de dénoncer l’abus de l’industrie sur ces filles, mais quand on les voit on remarque que ce sont principalement des gourdes dont l’intérêt principal n’est que lucratif, certaines font genre "j’aime le cul je veux devenir une star !" en gloussant pour qu’une fois s’en prenant une bonne grosse dans le cul commencent à froncer les sourcils.
En fait je trouve la démarche via la construction narrative (oui parce qu’il faut avouer que le documentaire est savamment construit) foncièrement moralisatrice, Bauer et Gradus ne font que citer quelques sources et chiffres informatifs pour recouvrir le tout d’une histoire à mon goût quelque peu trop scénarisée et volontairement orientée de façon à ce que le spectateur prenne automatiquement parti, et ça c’est gênant. Rien que le passage où la mère et la fille discutent en sanglotant dans le canapé familial on est en plein Confessions intimes, on retrouve certains codes de mise en scène de télé réalité pour chambouler la ménagère qui croit dur comme fer à ce qu’elle voit à l’écran, idem pour l’extrait avec son père qui n’est pas au courant de ce qu’elle fait (sérieux ?!) et où elle doit lui annoncer entre deux tirs au canard. Après ça n’est sans doute pas poussé vers la fiction mais personnellement j’émets tout de même des doutes sur la véracité du dossier, car certaines choses paraissent trop grosses à avaler.
Et puis la notion de "femme accessoire" je veux bien mais c’est profondément antinomique venant de la bouche d’une des actrices, qui plus est celle qui se vantait de kiffer la bite, encore une preuve de prise de parti puisqu’il est dit que "seul l’homme prend du plaisir dans l’histoire", si c’est le cas où sont les témoignages d’acteurs ? Et puis bon sang c’est elles qui se sont lancées là dedans pour se faire du pognon facile, en prenant bien soin au passage de mépriser les prolétaires, on les fait passer pour des esclaves sexuels alors qu’elles sont consentantes depuis le début, il suffit juste d’assumer à un moment. Ce sont elles qui "s’auto-détruisent", l’industrie ne fait que profiter de leur docilité et du système en général. C’est pareil, pourquoi ne pas recueillir plus de déclarations des exploitants en question ? Parce que le gars de 23 piges qui fait tourner son petit commerce maison n’a pas grand chose à dire, lui ce qui le préoccupe c’est de recycler son business en le fructifiant, il aurait fallu remonter la filière.
Après la chose que j’ai trouvé assez intéressante c’est de constater la demande du public, les attentes que les consommateurs ont du porno amateur, par exemple le "facial abuse", pratique relativement glauque qui mélange fellation, violence physique et verbale, et vomissements, ça dénote vraiment la perversité du spectateur qui en demande toujours plus, c’est plutôt fascinant. Ça m’a fait penser à Vidéodrome, cette idée que les gens ne veulent plus de soft, ils désirent repousser leurs limites à travers le prisme de l’écran intime, assouvir des fantasmes singuliers … Bon perso ça n’est absolument pas mon trip mais bon, tous les goûts sont dans la nature comme on dit, là aussi le documentaire aurait eu du mérite à faire connaitre les motivations de ces personnes à privilégier cette catégorie, par visages et voix masquées par exemple, histoire de comprendre comment l’industrie et la demande ont évoluées, mais non la ligne de conduite ne déraille jamais de son objectif : réhabiliter la dignité de ces pauvres nenettes.
Comme je disais la trame évolutive du format est "efficace" puisqu’elle pose des réflexions bien-pensantes, notamment sur les réactions que peuvent avoir la famille et le petit ami de la fille en question qui d’un sens se prostitue, là aussi ça aurait pu être bien traité mais s’axer uniquement sur le cas particulier de Tressa instrumentalise notre point de vue d’un certain sens. On la voit s’arrêter grâce à l’insistance de son entourage, ça devenait malsain pour elle, tout est bien qui fini bien, mais il est sans doute possible de trouver des filles qui aiment réellement ce qu’elles font et qui assument totalement. Faut-il nécessairement diaboliser ce milieu ? Le sexe a toujours été une industrie, il n’est question que de combler la frustration libidineuse de ses consommateurs, bien sûr il y a des victimes malgré elles, mais une petite branlette vaut bien quelques sacrifices non ? (j’ironise hein).
Ce Hot Girls Wanted n’est à mon sens pas un bon documentaire, il aborde quelques pistes qui prêtent à réfléchir mais malheureusement trop minces pour véritablement construire une synthèse des différents enjeux socio-économiques et humains que représente cette toute puissante machinerie média, c’est un peu facile d’en dénoncer une partie selon un point de vue tranché et d’en généraliser les méfaits, ce qui rend inévitablement le rendu moralisateur, restent cependant quelques infos instructives.