L'arbitre de ce choc des titans sera la technique mise en oeuvre. Car on ne peut pas retirer à Hôtel Transylvanie 2 la beauté et la fluidité de ce qu'il nous met sous les yeux. Le graphisme est tout rond, l'animation coule de source, les couleurs chatoyantes sont partout et les éclairages magnifiques, même pendant les scènes nocturnes. C'est peut être là que le bas blesse, surtout pour un film mettant en scène des monstres. Il faudra en effet attendre le dernier quart d'heure avant d'enfin se retrouver dans un chateau aux environs bleu-nuit désolés avec des chauves-souris au plafond, les yeux rouge sang. Mais le film passe plutôt bien à l'oeil du fan de beaux longs-métrages et il y a de quoi trouver son compte en cette matière.
Mais je vois les deux protagonistes de ce combat monter sur le ring et rejoindre leur coin respectif. Visiblement, ils ont envie d'en découdre et se narguent déjà, impatients de mutuellement se défoncer la carafe à coups de poings. Et ils ont des arguments à faire valoir...
A ma gauche, on ne compte plus ses victoires ; venue tout droit de la bien pensance, Ratés de l'intégration piaffe à l'idée d'abattre sur la tronche de son adversaire son uppercut "morale cucul" qui l'étourdira immédiatement par la lourdeur du coup. Mais surtout sa bonne droite "hypocrisie". Dans Hôtel Transylvanie 2, ce coup là, elle en use et en abuse. Alors qu'au début du film, le miel des paroles de Drac' prône la tolérance et la mixité sociale humains / monstres, il n'aura pourtant de cesse de vouloir changer la nature de son petit-fils pour perpétuer la lignée. Bel exemple de tolérance. C'est comme si Nadine Morano se vantait d'avoir une meilleure amie noire plus noire qu'une arabe...
Dans le coin droit, Standardisation de la production reste stoïque car il est sûr de sa force. C'est sûr qu'Hôtel Transylvanie 2 ne mécontentera personne tant il est consensuel, calibré et exécuté en mode automatique sans surprise. A l'image de ce graphisme tout rond et de cette lumière éclatante qui ne risque pas d'effrayer les petits avec leurs lunettes 3D sur le nez. Des fois qu'ils tomberaient du siège cinéma et que les géniteurs intenteraient un procès... Car tout est inoffensif. Comme l'humour très rarement à double sens. Souvent au ras du gazon. Mais mieux vaut qu'il y reste, c'est là où il est encore le plus efficace. Car quand il essaie de s'élever et de pasticher, il tourne en dérision, par exemple, le Dracula de Francis Ford Coppola. Tout en laissant le spectateur interdit... Standardisation de la production devrait se contenter d'affronter des adversaires à son niveau et éviter de se frotter à la catégorie poids lourds...
Quant aux monstres mis en scène, l'humour déployé ne sert qu'à les ridiculiser et non à leur rendre hommage. Genndy Tartakovsky, au passage, va jusqu'à les vider de toute signification et à se contredire sur leur nature d'un gag à l'autre. Par exemple, Mavis la vampirette aux grosses cuisses n'apparaît pas sur les photos de son mariage mais elle peut se refléter sur une caméra vidéo d'une supérette et apparaîttre sur l'enregistrement... De rares éclairs de lucidité, où enfin, l'aspect monstrueux et/ou flippant est exploité, font rêver à ce que le film aurait dû être.
L'hôtel du titre, lui, ne sert plus que de vague décor qui permet de faire évoluer une foule monstrueuse indistincte et métissée. Comme le film, du reste, qui ne fait qu'agiter sous le nez du spectateur en bas âge des marionnettes représentant des monstres dont Genndy Tartakovsky évite très soigneusement d'exploiter la nature horrifique et tout le potentiel comique. Tout cela est paresseusement plaqué ici sur une intrigue familiale mille fois rabâchée qui a cette fâcheuse tendance à plomber les suites de films d'animation en les embourgeoisant, comme Shrek ou l'Age de Glace. D'ici à considérer que la naissance de l'enfant numérique sonne systématiquement le glas d'une franchise...
Les juges, eux, semblent déjà être de parti pris. Celui du premier match, Serge Faliu, qui assurait le doublage de Drac' en VF, s'est vu évincer sur l'autel du nom ronflant au profit d'un Kad Merad honteux en mode Michel Leeb du pauvre qui énerve dès les premières minutes tant il est caricatural et outrancier. Etonnant qu'il n'ait pas fait de tournée promo à la télé pour vanter sa nouvelle "performance"... Genndy Tartakovsky, lui, applaudit des deux mains à tout ce qu'il fait et se croit obligé de finir son film en mode climax super héros. Celui-ci voit les trois générations de vampires mettre la main à la patte pour botter le cul d'un méchant méchant apparu à peine un quart d'heure avant comme un cheveu sur la soupe et sans explication quant à ses motifs.
Afin d'assurer à son public qu'il aime ce qu'il met en scène, l'ami Genndy (l'ami des petits, ça rime) clôture d'ailleurs son film en une chanson au titre évocateur : I'm in love with monsters. En l'écoutant, et en repensant à ce Hôtel Transylvanie 2 loin d'être transcendant, mais pas non plus ignoble, il n'est pas interdit de penser que "Qui trop embrasse, mal étreint".
Behind_the_Mask, small freakshow.