J'avais commencé le livre de Zinn, et j'avoue ne pas être allé au bout, même si je le finirai un jour. Bien sûr, il est incroyable, ce livre d'un historien américain consacré aux contestations populaires et aux manipulations du peuple par le capitalisme. Mais il me donnait parfois l'impression d'être un antimanuel, une sorte de livre qui écrirait les pages manquantes des manuels scolaires, avec du coup peu de suite entre les chapitres. Bref, une série de monographies sur des moments-clé de la contestation aux Etats-Unis, avec toujours l'horrible cycle contestation-répression.
Ici, donc, c'est un documentaire, enfin la partie 1 d'un documentaire portant à la fois sur Zinn, sur le sujet de son ouvrage-phare, et sur l'influence de cet ouvrage de nos jours. Concrétement, on a un montage faisant alterner des entretiens avec Howard Zinn, des interviews de personnes connues (Chris Hedges, prix Pulitzer et journaliste ayant claqué la porte du NY Times) et moins connues (des syndicalistes commémorant le massacre de Haymarket, ou la grève de 1908 à (j'ai déjà oublié où)). Et des images d'archives. Le tout est cimenté par le commentaire oral de Daniel Mermet, un peu trop accessible peut-être dans sa métaphore filée des lapins/prolétaires et des chasseurs/capitalistes. Il y a aussi des trucages animant des photos de gens sympathiques comme Rockefeller ou Carnegie s'autocitant de manière accablante.
Au niveau son, c'est assez travaillé, avec des bruitages comme des roulements de tambour sur les images de guerre, des bruits sourds sur des images de bombardiers, etc... Classique, peut-être un peu trop.
Ce n'est pas un film qui m'a appris grand-chose, et je doute qu'il touche beaucoup les masses populaires, hélas. Le problème de ce genre de film, c'est qu'il est facile de parler des luttes des classes anciennes, quand il y avait un appareil industriel clair, mais qu'aujourd'hui, la lutte des oppresseurs et des oppressés a pris un visage beaucoup plus insidieux et moins visible, mais qu'hélas ce film n'y apportera pas de réponse. Mais c'est tout de même bien qu'il existe, qu'il ait été financé de manière participative et tout. Je ne sais pas si j'irai voir la suite dès sa sortie, mais j'essaierai de voir le produit fini.
Autre remarque : on sent que le film a été produit en France, et parfois, notamment quand il est question de la Grande Guerre, comme du moment qui fait s'éteindre les espoirs socialistes, on quitte les Etats-Unis pour parler de la France, et là, on se demande s'il n'y a pas un peu de hors-sujet, et si ça fait du bien au propos.