Insoutenable et abominable mais quand même une belle grosse claque dans la gueule !
Quand on pense Steve McQueen, on pense généralement à cet acteur de renom des années 50-60 et passionné de grosses cylindrées. Mais ce n'est pas de celui ci dont il est question ici. Ici on ne parle pas de voitures ou d'explosions mais d'un combat. Un combat qui dura longtemps entre les murs de la prison de Haze en Irlande, et qui impliquera de nombreux prisonniers membres de l'IRA, prisonniers qui commencèrent leur révolution après avoir perdu le statut de prisonniers politiques. Pour se faire entendre, ils se sont remis à la dernière arme qu'il leur restait : leur corps. Ainsi ils entamèrent une grève de l'hygiène suivie d'une grève de la faim.
Autant que je prévienne tout de suite je vais beaucoup spoiler dans cette critique donc si vous n'avez pas vu le film et si vous voulez le voir, abstenez vous.
Steve McQueen peint l'univers carcéral comme rarement avant lui puisque le but des prisonniers présentés ici, n'est pas la liberté (comme c'est souvent le cas) mais de se faire reconnaître en tant qu'êtres humains. Ce point important le démarque d'emblée de films comme Vol au dessus d'un nid de coucou, Les évadés ou même la Ligne Verte. Ici les démarches entreprises par les prisonniers sont d'ordre d'hygiène et de bien être. Et Steve McQueen ne recule devant rien pour nous montrer l'horreur subie par ces personnes. Des murs entièrement recouverts de matière fécales aux maltraitances des prisonniers, la caméra nous montre les atrocités de l'époque. Pour réussir un tel coup de maître il fallait être sur de son fait niveau scénario. Et pourtant on pourrait le résumer en 3 parties distinctes et très simples : Mise en place du décor et découverte des personnages et du récit, le tournant et la séquence finale. Mais il ne se contente pas de tourner ce scénario en quelque chose de très bien, il en fait quelque chose de grandiose.
La première partie plante le décor. Pas d'une façon simple en quelques minutes, mais de façon réfléchie et progressive en 45. Ainsi McQueen plante sa caméra là où il faut et nous fait partager, tour après tour, une succession d'images plus horribles les unes que les autres. Je ne me cache pas, je dois bien avouer que j'ai eu du mal à passer ces premières minutes. Mais c'est grandiose. Magnifier des images aussi horribles, c'est fort. Très fort même. Beaucoup seraient tomber dans le piège de faire du gore pour du gore. Mais là le réalisateur s'attarde plus sur la douleur psychologique des prisonniers et, dans le même temps, celle de ses personnages. Première claque dans la gueule.
Faire une partie aussi sombre et aussi sevrée en dialogues et paroles étaient une façon de mieux nous éblouir par la suite. Car on a droit à une scène absolument exceptionnelle. Une performance d'acteurs monstrueuse. Ici on offre un plan séquence de 20 minutes de toute beauté. Une conversation dantesque entre Bobby Sands (Fassbender) et le père Moran (Cunningham). On passe de la pluie et du beau temps à la révolution des prisonniers de l'IRA en passant par une réflexion sur Dieu.... Tout y passe. Et tout en une prise. Vraiment fabuleux. Et c'est cette scène qui fait basculer le film, puisque c'est ici que l'on apprend la volonté de Bobby Sands d'entamer une grève de la faim pour faire entendre sa voix. Deuxième claque dans la gueule.
Et enfin l'épilogue de l'histoire. Fassbender est fantastique. Je ne sais pas combien de poids il a pu perdre pour ce film mais c'en est presque effrayant. La transformation physique est impressionnante et souligne le fait que l'homme est près à sacrifier jusqu'à son corps et sa propre vie pour pouvoir obtenir réparation. Encore une fois McQueen sublime toute la séquence par sa mise en scène ultra efficace et qui vous prend jusqu'aux tripes. Troisième claque dans la gueule.
Au bout du compte on en prend plein la gueule, on souffre mais on est surtout admiratif de ce travail de mise en scène et d'acteurs livrés par les différents protagonistes. On en ressort en pièce, on est bouleversé mais on se dit qu'au bout du compte on a quand même assisté à un très grand moment de cinéma.