Il faut toujours se méfier des films qui utilisent comme accroche promotionnelle des citations de réalisateurs de renoms car cela n'est pas nécessairement gage de qualité mais en plus il y a une certaine prétention à laisser sous entendre que son film est révolutionnaire car un cinéaste reconnu et apprécié l'a dit. A chaque fois que j'ai vu un film qui se croyait bon car il avait été adoubé par des cinéastes et bien la déception était au rendez-vous, ces films n'étant jamais à la hauteur des cinéastes qui les parraines. Et ici le deuxième film de Gerard Johnson ne déroge malheureusement pas à la règle et ce montre assez insignifiant.


Il y a d'ailleurs rien de plus fascinant que de voir un mec enfoncer des portes ouvertes avec pourtant la certitude de révolutionner le genre du thriller. Tout d'abord le scénario cumule tout les clichés des films sur la corruption, tout le monde est pourri sans exception, le héros est un personnage lâche et torturé qui se remet en question, doute et qui finalement à une légère morale, ses collègues sont totalement pourris, les méchants sont très très méchants et etc. On nage dans un bain de stéréotypes, tous les personnages sont caricaturaux et sans nuances où quand ils en ont on tombe dans les clichés et les rebondissements sont connus d'avance. On sait comment le film va se dérouler et finir avant même de l'avoir vu car au final on l'a déjà vu mais ailleurs et en mieux. C'est le problème des films très référencés qui veulent absolument copier leurs modèles, ils ne font qu'une pâle copie de ce que ceux-ci ont déjà fait, ils ne font que remplir un cahier des charges pour correspondre aux thrillers nihilistes à la Refn et c'est tout. Pourtant du moment que l'on est fan de ce genre de film cela fonctionne. Le ton nihiliste de l'ensemble est très poussé nous offrant un polar noir désespéré et brutal qui fait son petit effet malgré quelques problèmes de rythmes évidents, faute à une trop forte tendance à l'esbroufe. Johnson va offrir des scènes en suspensions, des scènes qui se démarque du reste et qui n'ont pas grande utilité que de faire dans le sensationnel. Ces scènes marquent des pauses dans le récit, généralement le son ambiant devient étouffé et une musique pop se lance pour bien marquer ses effets, des scènes assez gratuites qui ne servent qu'à en mettre plein les yeux mais qui n'ont pas vraiment de porter outre mesure. Et cette sensation d’assister à un cinéma de petit malin devient assez vite agaçante, Johnson étant bien trop sûr de ses effets et étant bien trop persuadé de faire un grand film qu'il se repose de tout son poids sur ses aînés sans pour autant révolutionner le tout en apportant sa propre vision du genre. On à donc un film en manque total d'originalité et qui est aussi déjà-vu mais qui n'est pas pour autant désagréable, l'ensemble se suit et se montre efficace grâce à un bon travail sur les dialogues et un final bien pensé même si trop évident et quelque peu frustrant. Laisser cette fin en suspension de façon si abrupte est habile car au final tout a déjà été dit, même si tous avait été déjà dit avant ce film, et cela permet de bien mettre en avant toute la complexité du personnage principal qui oscille entre moralité et lâcheté. D'ailleurs cet anti-héros est clairement la force de ce film, il est un personnage antipathique mais on arrive néanmoins à s'attacher à lui grâce à ses quelques nuances et surtout grâce à l'acteur qui l’interprète.
D'ailleurs le casting est globalement très bon même si certains acteurs se complaisent dans le surjeu et le caricatural comme Stephen Graham qui quoiqu'il fasse à le mot pourri sur sa tête et il accentue bien cela avec son jeu outré et grandiloquent. Le reste du cast s'en sort très bien même si pareil il est assez évident qui seront les pires ordures car les acteurs ont tendances à en faire un peu trop mais globalement ils font un travail impeccable. Le seul qui domine vraiment l'ensemble et bien évidemment Peter Ferdinando qui compose un personnage tout en nuance, nuance qui n'était pas sur le papier d'ailleurs, en lui donnant une profondeur inespérée grâce au magnétisme de son regard où on y voit passer le doute, la peur mais aussi la compassion. Il offre une prestation à fleur de peau assez impressionnante de par l'aisance et le naturel dont il peut faire preuve. Un grand acteur qui mérite assurément à être connu.
Pour ce qui est de la réalisation, celle-ci est techniquement très réussi. Que ce soit la magnifique photographie très esthétisée, la sélection musicale pop qui se montre moins évidente que l'on pourrait le croire qui propose des morceaux assez originaux pour le coup, ne misant pas tout sur l'électro et le montage assez classique se montre maîtrisé. La mise en scène de Gerard Johnson, est quant à elle plus problématique. Malgré une introduction fracassante et plastiquement sublime, même si trop référencée, celle-ci se révèle au final comme une fausse piste. Elle se montrait étrange et définitivement autre mais elle n'est pas le reflet de ce que sera le film, bien plus classique au final et cette intro ne sert au final qu'à faire dans l'esbroufe gratuite où Johnson se regarde carrément filmer. C'est dommage car si il avait choisi de suivre les pistes lancées par son intro il aurait pu faire un film bien plus stimulant et original. D'ailleurs ses moments de flottements et d'esbroufe gratuite, le réalisateur en abusera beaucoup trop tombant même parfois dans l'absurde et la répétition avec les collègues du héros faisant la fête et se badigeonnant de ketchup. Sinon le cadrage se fera très serré, collant au plus près des personnages à la manière de Refn mais le côté symbolique en moins car lors que Refn filmait l'arrière du crâne tatoué par le mot "Respect" de Mikkelsen dans Pusher 2 cela avait une portée symbolique sur le film. Alors que là quand Johnson multiplie les plans sur l'arrière de son personnage quand celui-ci marche, et assit ou autre, c'est juste pour faire de l'esthétisation et il a trop tendance à placer sa caméra de cette manière ce qui devient agaçant. La mise en scène ne se renouvelle jamais ce qui fait que l'on est plus devant un format télévisuelle que cinématographique, n'utilisant pas assez l'environnement comme un personnage, ce qui fait que l'ensemble manque de vitalité et se montre sans ampleur étant au final assez générique. Néanmoins l'ensemble reste efficace et maîtrisé, on à clairement pas affaire à un travail de tâcheron, mais le film reste étouffé par ses influences trop évidentes, on pense beaucoup à Refn, Noé mais aussi au Bad Lieutenant de Ferrara, et n'est qu'un ersatz de ce qu'a déjà fait ses aînés.


En conclusion Hyena est un film sympathique dans la mesure où si l'on aime ce genre de film et que l'on adore les cinéastes précédemment cités, on ne peut qu’apprécier ce dernier. Car malgré ses nombreux défauts on le regarde sans déplaisir et on se prend au jeu même si il ne se fera jamais aussi percutant, marquant et fascinant que ses aînés. C'est au final un film sans incidence, il n'est ni bon ni mauvais, on le voit et on l'oublie et même si il est relativement efficace dans ce qu'il entreprend il ne marquera clairement pas le genre ni le cinéma. Donc ne vous fier pas à l'accroche de Refn qui dit que Hyena représente le futur du thriller car celui-ci vient plutôt du passé et a même 15 ans de retard et c'est là au final son principal défaut.

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le 7 mai 2015

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