Douzième du Top100 de la BFI (établi trente ans après), If... attaque les institutions scolaires d'élite (les 'public school' comme Eton ou le Winchester College). Sa critique affecte d'autres représentants de 'l'establishment' britannique (hiérarchie), ou de l'ordre traditionnel (gardiens moraux), dans la foulée. Dans les dernières séquences, la poignée de rebelles semble opter pour le martyr stupide – l'hommage au Zéro de conduite de Vigo serait alors à son comble. Le film ne pose pas de revendications et qu'un minimum d'indignations. Les pontes moralistes sont les plus désagréables et opprimants : ce sont les élèves de la classe supérieure et les religieux, bref les surveillants au premier degré. Le directeur se montre plus ouvert et se veut compréhensif, en vain ; finalement la 'vieille garde' est plus contrariante que menaçante (comme ce vieux militaire à l'aplomb ridicule, au courage décalé).
La séance est tout aussi marquante (plus avec le recul) pour ses choix esthétiques et narratifs originaux. Des scènes en noir et blanc sont intégrées, certaines vont dans la pure divagation (on se demande s'il s'agit de fantasmes d'un instant, parfois ça l'est ostensiblement – au bar avec la fille). Le romantisme comme l'homosexualité sont flagrants voire déclarés, mais toujours en différant ou avec des barrières (l'étiquette, le respect dû aux aînés, ou des justifications pratiques servent cette mise en suspens). De quoi laisser croire aux esprits innocents que tout ça relève de l'imaginaire ou de l'éventualité, plutôt que de la réalité. Ces moments, notamment celui en salle de sport, doivent être du goût de Xavier Dolan. La dureté du système pousse parfois les rapports vers un sadomasochisme où chacun a toutes les raisons de se réfugier derrière les règles ou les principes pour digérer les événements.
Ce qui peut être ressenti comme un écueil concernant cette Palme d'Or cannoise de 1969, c'est le manque de développement des personnages. Sans entrer dans une logique accomplie de 'film choral', If reste sur une approche supra-individuelle même lorsqu'il zoome. Le titre est une référence au poème homonyme de Rudyard Kipling, ironique ou au moins défiante puisqu'il incarne les valeurs pourfendues dans le film (même s'il en retient passablement l'appel au courage). Celui-ci met au monde Michael Travis, personnage d'une trilogie (complétée par Le meilleur des mondes et Britannia Hospital) où Malcolm McDowell tournera à nouveau pour le compte d'Anderson. C'est une première apparition fracassante pour le futur Caligula. Il a d'ailleurs tapé dans l’œil de Kubrick pour ce rôle (avant d'être engagé pour Orange mécanique et devenir une icône subversive en tant qu'Alex DeLarge).
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