(Texte datant de janvier 2023)
1961, un groupe de spéléologues découvrent une grotte en Calabre, dans le sud de l'Italie. Ils se lancent dans une expédition. Un vieux vacher les observe depuis sa montagne.
S'il fallait ne donner qu'un argument en faveur du film, ce serait évidemment sa beauté formelle : son sens du cadre, d'une grande sobriété, son rythme lent faisant pleinement ressentir l'immensité du monde, la grandeur du ciel, de la montagne et du souterrain ; en plus de remettre l'humain sur un pied d'égalité avec l'animal, le végétal et le minéral, chaque chose est à sa place sans prendre le pas sur le reste. Et bien sûr, cette mystérieuse grotte, fascinante et angoissante, qui offre des images à tomber, grâce à l'usage exclusif de lumières naturelles, de part les lampes des casques ou cette idée géniale des pages de magazines enflammées, jetées dans les profondeurs en guise de sondes. Sur les parois humides vous imaginez bien le rendu... Bref c'est beau.
Mais plus encore, Il Buco est un rappel à un cinéma primitif, où l'émotion repose avant tout sur l'image et le son naturel. Pas d'effets techniques impressionnants, pas de musique rajoutée, pas de dialogues (quelques mots ici et là mais rien de bien important), pas d'intrigue appuyée ou de grands enjeux pour se donner un semblant d'intérêt ; le film réussit avec brio à se passer de tout ses artifices et à quand même fasciner pendant 1h30.
En témoignent ces spéléos, filmés avec simplicité, dénués de toute caractérisation et même de visages (à peine montrés), mais devenant de parfaits vecteurs de cet émerveillement enfantin de la découverte, l'excitation de partir à l'aventure avec trois bouts de ficelle, voir ce qui ce cache au fond de ce *"buco"*.
Seuls la grotte et le Vacher peuvent être qualifiés de "personnages" ici, tout deux dégagent une aura mystique, comme s'ils étaient là depuis l'aube des temps. Le montage fait naître une connexion spirituelle entre eux, la santé du vieil homme se dégradant au fur et à mesure que les spéléologues descendent dans l'abîme, comme si quelque chose, une époque, un monde, était en train de s'achever...
Tout cela peut paraître péteux, mais c'est un film qui ne l'est pas du tout, rien n'est imposé, tout se déroule naturellement tel le cours de la vie, laissant toute la liberté au spectateur de voir ce qu'il veut et de s'enivrer de ses paysages et de cette atmosphère, de pleinement vivre cette fresque.
Car c'est ça, la chose à retenir, c'est avant tout un film qui se vit, puis qui se digère lentement, et qui finit par vous hanter longtemps après son visionnage...
Une expérience marquante, comme on en voit que très... trop rarement.