Il Etait Une Fois Dans l’Ouest ou le western mythique d’un sorcier rital de génie, œuvre titanesque d’un alchimiste latin ayant trouvé, après des années de recherche acharnées, la formule tant convoitée pour changer le western en or. Il en reste aujourd’hui un film devenu digne des plus grandes mythologies, formule magique à jamais oubliée de l’humanité car enterrée avec son créateur pour l’éternité. Mais, il se dit cependant que chaque vingt-neuf février, si le clair de lune vient frapper d'un rayon bleuté le milieu du fronton du Parthenon à minuit précise et qu’une jeune vierge du cours Florent y est offerte en sacrifice aux Dieux du cinéma, alors la formule alchimique de ce film apparaît aux yeux de l’humanité pendant une seule minute et redonne l’espoir de faire un jour un film aussi parfait, mais ça n’est qu’une légende bonne pour satisfaire mes esprits crédules.
Il y a toutefois des informations authentiques et vérifiables, notamment celles attestant que Sergio Leone était en fait Ecossais par sa mère, nommée elle-même MacLeod. Il serait mort le 30 avril 1989, la tête tranchée à l’âge non négligeable de quatre cents ans, emportant son secret dans la tombe. On entend dire que ce film serait le fruit de tous ces siècles de recherches inlassables sur l’Equilibre Cinématographique. Cet Equilibre serait en fait le fruit du nombre d’or cinématographique qui donnerait cette adéquation idéale entre le scénario, la musique, la mise en scène et le jeu des acteurs. La rumeur raconte que Sergio MacLeod aurait passé parois des années sans dormir à manipuler des regards, des notes de musique et des rebondissements. Il aurait dessiné des centaines de croquis, jusqu’à l’épuisement parfois, enfermé pendant des jours sans s’alimenter, survivant uniquement avec des hectolitres de Lacrima Christi Del Vesuvio, et du meilleur !
Au cours de toutes ces vies, il aurait vécu dans des bâtisses abritant toujours de gigantesques souterrains, afin de les transformer en de sombres laboratoires où il poursuivait ses recherches, y entreposant dessins, partitions, castings. Il tentait tous les assemblages possibles, toutes les combinaisons, tous les calculs, parfois jusqu’à l’évanouissement tant il s’épuisait dans sa quête. Peu de femmes semblent avoir réussi à faire partie de sa vie, tant il se consacrait à son œuvre majeure : créer le plus grand western de l’histoire. Plusieurs de ses expériences lui ont donné des espoirs sans parvenir à le satisfaire. Il a découvert la formule de la trilogie du Dollar, celle du Colosse De Rhodes, prémices d’une découverte à venir, mais cela il l’ignorait encore.
Puis un jour Sergio fit une rencontre décisive, celle d’un autre alchimiste, Ennio, musicien du clan Cumming (rivaux des MacLeod) celui-là, âgé comme lui d’un peu plus de trois cents cinquante ans et également à la recherche de l’œuvre ultime. Tout deux mirent alors en commun le fruit de leurs recherches, partageant leurs laboratoires, refusant de faire laboratoire commun et tentant de nouvelles combinaisons : yeux bleus aciers avec train à vapeur, Charles Bronson plutôt que Clint Eastwood, Claudia Cardinale et fermier assassiné. Plusieurs expériences ont bien sûr échoué, mettant parfois leurs vies en danger car leurs laboratoires de recherches étaient dépourvus de toute sécurité, le danger semblait les stimuler et accélérer leurs recherches.
Puis un jour la vérité les frappa, ils tenaient enfin la formule de la bobine philosophale : Sergio avec sa mise en scène, Ennio avec sa partition, Charles, Henry et Claudia dans les rôles principales, Fulvio apporterait les fonds, Tonino la photographie. Enfin, ils tenaient le chef-d’œuvre ultime, le western qui serait presque égalé mais jamais dépassé, car ils décidèrent de brûler la formule dès la fin de la production. Il ne reste aujourd’hui de ces siècles de recherche que trois heures du plus grand western de l’histoire, devenu référence à laquelle tous les autres viennent se comparer, alchimie entre deux magiciens du cinéma et leur équipe, une bobine qui se ressent avec le corps autant qu’elle se regarde avec les yeux. Cette découverte majeure de la chimie cinématographique s’adresse directement à l’âme et restera unique tant que le sacrifice de jeunes vierges restera prohibé par la morale de Dieu et par la Loi des hommes…