Paola Cortellesi offre tout son amour au cinéma italien, en réalisant ce magnifique film, plein d'humour, de douleur, et de passion pour l'histoire de Delia ( Paola Cortellesi ).
Une femme et sa condition féminine d'après-guerre en Italie, qui apprend à vivre ce langage de la violence dès la première scène, par une claque dans la gueule, comme une autre manière de dire bonjour au réveil, par son bourreau de mari, Ivano ( Valerio Mastandrea ). Qui à mesure de l'aimer, ne cesse d'avoir la main de plus en plus lourde. Et ce vieux pervers d'Ottorino ( Giorgio Colangeli ), qui lui met une gentille main au fesse, en signe d'affection, tel père, tel fils. Heureusement il y a sa fille, Marcella ( Romana maggiora Vergano ), qu'elle adore, mais qui la regarde avec des yeux remplis de honte, ne sachant plus comment lui dire son propre malheur. Ainsi que ces deux petits bambini, qui ne s'arrêtent jamais de courir et de s'insulter à longueur de journée.
Delia est une femme d'hier et d'aujourd'hui, qui constamment souffre de la misogynie de son mari. Enfermée dans son propre feu, à qui pourtant elle pardonne tout. De la violence physique, aux poisons de ces mots venimeux qui coulent un peu plus chaque jour tout le long de son corp.
Delia, de même que toutes ces femmes ont connu cette épreuve unique et terrible que l'on appelle la guerre. Un cœur et leurs armures, formant au fil du temps des combattantes, symbole d'une résilience. Un caractère et une force insoupçonnée à résister sans jamais broncher.
Paola Cortellesi choisit de capturer l'instant, une mémoire en noir et blanc, ce qui rend son film encore plus beau, lorsqu'il nous rappelle ce néoréalisme des années 40. Des films aux images tendres et sombres, d'une pauvreté à la condition contrainte de toutes ces femmes aux foyers, à l'apparence d'une prison de misère.
Soudainement la caméra si facile et naturelle de la réalisatrice devient original, lorsqu'elle choisit de laisser place aux rêves tragiques d'une danse musicale improvisée. Une chorégraphie légère, infligeant des gifles et des coups de tête, à la violence sans égard. Ivano qui mène le bal de chaque mouvement gracieux, un va-et-vient douloureux, joué au rythme de ces notes d'une telle réalité cruelle.
Un film quasi parfait, de la musique, au détails reconstruits de l'Italie de l'époque, son atmosphère. La photographie de Davide Leone, l'interprétation de chacun des comédiens, de Paola Cortellesi, le regard bas, souvent soumise et résignée. Qui parfois laisse place à quelque moment de joie et de sourire. L'instant d'un soleil, sa fille qui s'assombrit, qu'elle veut heureuse, loin de sa vie. Son amie Marisa ( Emanuela Fanelli ), avec qui elle rit, tous ces petits gestes perdus, une lettre et le courage d'un premier pas vers la liberté. Face à toutes ces envies d'aimer, ces envies d'ailleurs, condamnée à errer dans l'ombre de ce tyran.
Il reste encore demain, montre une excellente capacité dans la description approfondie des personnages, cet humour noir. Des voisins qui s'insultent pour oublier leurs propres conditions humaines, et les rumeurs qui courent en chacun d'entre eux. Un élan positif de libération à la détresse de la guerre, à l'arrivée des américains.
Une volonté d'espoir, Delia et toutes ces femmes qui ont marqué l'histoire. Un combat, celui du patriarcat et de ces hommes fiers et violents. Pour ne jamais oublier de croire et d'espérer un jour peut-être d'être libre, de ces hommes qui aiment battre leurs femmes. Un long chemin, quand il reste encore demain.