Ce qui fait l’originalité et aussi la force de Vuelven, c’est d’entrelacer l’approche réaliste d’un milieu social et politique – le Mexique d’aujourd’hui – avec une esthétique du contrepoint fantastique, soit la mise en contact de deux représentations a priori incompatibles et dont l’interpénétration donne vie à une poésie douloureuse et sensible. Ainsi, Issa López offre à ses jeunes protagonistes une profondeur véritable : en les faisant cohabiter avec des ombres, en multipliant les phases de communication – le plus souvent par l’épouvante – avec celles et ceux qui sont morts dans la souffrance, elle construit une spiritualité mortifère mais susceptible de les raccorder à un au-delà verdoyant, en témoignent la clausule et son ouverture vers un ailleurs lumineux et serein. La réalisation accentue l’âpreté de cette enfance sans rires et sans joies par l’intermédiaires d’un animal-totem, le tigre, que déclinent des dessins muraux qui s’animent et dévorent des petits bonshommes malheureux, une peluche qui indique à la fille l’emplacement de sa défunte mère, l’incarnation enfin, comme dédoublement d’Estrella, de sa rage de vivre et de vaincre dans un Mexique apocalyptique.