Ce film casse les codes nazis plus que les codes du genre.
La tragédie que représente le destin d'Allan Turning prédestinait une adaptation hollywoodienne de haut vol. Même si le film n'est pas dénué de gros défauts, je tiens à dire que je suis heureux d'en apprendre plus sur cet homme (ou d'en apprendre tout court, commençons par ça). Dans cette idée, "Imitation Game" a déjà gagné mes faveurs par le devoir de mémoire dans lequel il s'engage. De plus, le personnage de ce scientifique est atypique, attachant et mérite qu'on s'y attarde. Le film le fait réaliser dés les premières minutes et nous promet des moments de malaise assez amusants.
Les codes du biopic et du film d"histoire vrai" sont savamment repris et, en tant qu'adepte du genre, je n'ai pas été déçu. Cependant, je n'ai pas été surpris non plus. Le cinéma ne sait décidément toujours pas mettre en scène la science et les mathématiques. Comme pour "Une merveilleuse histoire du temps" racontant la vie du théoricien Stephen Hawking, le film de Turning a le défaut de ne pas assez mettre en valeur les travaux et les exploits du mathématicien qui représentent pourtant la sève du récit et sa contribution à l'Histoire. A ce titre, le film se révèle malheureusement assez facile et superficiel malgré deux bonnes heures.
L'ensemble des partis pris de l'histoire éloignent également le récit de la seconde dimension importante du personnage : son homosexualité. Elle n'est pas mise en scène et en devient presque plus théorique que les mathématiques elles mêmes. C'est gênant, le cinéma grand public ayant à mon sens besoin de voir plus d'hommes qui en embrassent d'autres. Mais il s'agissait aussi et surtout à travers la présence d'images plus explicites de faire exploser le silence insupportable entourant les travaux et la sexualité de cet homme que le monde a nié d'un bout à l'autre. Sur ces points qui sont pourtant essentiels, le film ne remplit pas son contrat puisque le silence n'est qu'à peine fissuré. C'est vraiment dommage !