- Yeah, well, I guess they had it coming. - We all got it coming, kid.

Outre la beauté esthétique évidente du film, Unforgiven m'a marqué en étant un des seuls westerns "humains" qu'il m'a été donné de voir. Spontanément, seul True Grit (original + remake) me vient à l'esprit pour entrer dans cette catégorie. Ceux qui pensent assister à deux heures de fusillades en auront pour leurs frais, on réfléchit ici à savoir où est la limite entre le bien et le mal, et même si cette limite existe.

Comme s'il se sentait trop vieux pour faire de nouveaux westerns et qu'il souhaitait que personne ne passe après lui, Eastwood déconstruit ici le genre que lui-même a magnifié par le passé, comme pour le conclure.


J'aime à penser que le personnage de William Munny est un condensé de tous les personnages incarnés par Clint Eastwood dans ses plus jeunes années, et que ceux-ci avaient décidé de se retirer, réalisant l'horreur de leurs actes.
Unforgiven nous prouve par A+B que ces héros, ces justiciers qu'on admire tant ne sont rien de plus que des criminels embués par le whisky. Le film semble être une critique du genre, mais aussi de ceux qui l'ont cautionné; il nous reproche d'avoir adulé cette époque où le moindre différend se règle à coups de fusil, et où la sentence de mort est presque une peine plancher.
Les personnages vivent d'ailleurs dans le passé, à l'exception de Munny et son ami Ned. Ils glorifient encore cette époque où la justice était primaire, en témoigne le personnage de Beauchamp, toujours à la recherche de nouveaux exploits à retranscrire. Les anciens souhaitent par-dessus tout faire vivre leur légende, quitte à extrapoler ou inventer tels Little Bill ou English Bob, alors que les jeunes ont les dents longues comme Schofield Kid, bercés par les histoires qui leur ont été contées en occultant l'horreur de tuer, mais aussi l'état d'ébriété permanent de leurs protagonistes.


Un dialogue marque particulièrement, et c'est celui que j'ai mis en titre. Alors que Schofield Kid et Bill Munny attendent leurs gains, ils évoquent celui qu'ils viennent d'abattre. Le Kid dit qu'il méritait son sort, Munny lui rappelle que tous, lui comme eux, le méritent. En une réplique, Eastwood remet en question toute l'idéologie de ces justiciers du Far West. Certes ils ont abattu un homme mauvais, mais valent-ils mieux que lui ? Après tout, ne sont-ils pas des meurtriers d'avoir ainsi tué de sang froid ? En une réplique donc, Clint nous fait comprendre que notre approche du western a toujours été manichéenne, et que ceux qu'on identifiait comme les "gentils" ne l'étaient pas plus que les "méchants".

Un mot à présent sur la forme. Là encore, rien à jeter. Les dialogues sont d'une justesse impressionnante, tout en utilisant le jargon (que je suppose) d'époque, à tel point qu'il m'a fallu mettre les sous-titres tant les accents sont à couper au couteau et les fautes d'anglais (volontaires) multiples. Sans faire une liste exhaustive, on peut dire qu'Eastwood est impérial, Hackman au sommet de sa forme, Freeman fait le boulot et Woolvett, que je ne connaissais pas du tout, est très bon. C'est sale et mal éduqué, et c'est certainement le plus proche de la réalité parmi les films du genre.
La photo, quant à elle, est une pure merveille. Chaque plan, que ce soit dans la nature ou en intérieur, est un délice pour les yeux, on ne s'en lasse pas. Unforgiven réussit la prouesse d'être beau en plus d'être visible même dans la nuit et sous la pluie. La forme n'a véritablement rien à envier au fond, et ceux qui s'ennuiraient devant la réflexion proposée pourront se consoler en regardant les paysages de l'Ouest sauvage.


Peu de bons westerns ont été faits depuis Unforgiven, et si c'est en partie dû à un effet de mode qui a poussé le cinéma vers d'autres genres, je pense que c'est aussi dû au fait que ce film clôture parfaitement le tout, et rend dorénavant difficile la légitimation du chasseur de primes.

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le 22 juil. 2022

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Jake Elwood

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