"Ne pleurez pas...c'est juste une répétition."
J'avais déjà été subjugué par un premier visionnage d'In the mood for Love. Mais j'étais resté avec un sentiment étrange. Comme si, au fond de moi, je savais que ce film était grandiose, mais que je n'en avais pas vraiment saisi toute la beauté. Alors, quand je me suis rendu compte que la Cinémathèque de ma ville le diffusait, j'ai sauté sur l'occasion.
Je suis arrivé pile à l'heure, sous une pluie battante; j'avais froid et chaud, j'étais énervé, il y avait du monde, je suais à grosses gouttes. Puis, une fois assis et une fois mon souffle revenu, le film a commencé. Et j'ai senti que cette fois, ce ne serait pas pareil.
Aux premières notes de ce magique Yumeji's Theme, mes yeux se sont remplis de larmes, et chaque image du film, de la première à la dernière, m'a plongé dans un état incroyable. Comme si le film avait révélé en moi quelque chose de nouveau, comme s'il avait ouvert une nouvelle porte, une nouvelle dimension. La magie et la grâce des plans, la beauté et l'infinie tristesse de cette histoire, tout m'est apparu sous un nouveau jour, comme une évidence frappante. Je n'avais pas saisi la tragique mélancolie des dernières minutes de ce film, cette ambiguïté, ces dernières rencontres manquées et ces dernières tentatives d'obtenir un signe de l'autre, la terrible suprématie du temps sur le passé et sur les souvenirs, dont il ne reste plus qu'un vague secret enfoui sous une motte de terre, quelque part dans un temple majestueux du Cambodge.
"In the Mood for Love", de par sa grâce et sa pudeur, est peut-être la plus belle et la plus déchirante histoire d'amour qui soit. Et par la même occasion, le plus beau film du monde.
Quand je suis sorti de la salle, je tremblais encore, mes yeux et mes joues étaient encore humides. Et quand j'ai franchi la porte de la Cinémathèque, un soleil éblouissant inondait ma petite ville.