L'ennemi intime
NE PAS LIRE AVANT VISION DU FILM Intriguer, séduire, questionner, émouvoir. Si l'on souhaite parvenir à tout cela en un même mouvement, ces objectifs sont difficilement conciliables avec le cynisme...
le 30 août 2014
70 j'aime
15
Un chef-d'œuvre.
Style, rythme, thèmes abordés, et profondeur des personnages, Shyamalan fait un carton plein avec ce film. Un homme, David, après être devenu le seul survivant d'un accident ferroviaire monstre, se met à se poser des questions sur sa condition et ses rêves d'homme, tandis que sa vie de famille semble battre gravement de l'aile. La communication est difficile et la rupture non loin d'être consommé entre lui, sa conjointe et leurs fils.
Survient alors une rencontre entre David et Elijah Price, un homme à l'histoire singulière, victime de la maladie des os de verre. L'un et l'autre se lient dans un échange initiatique où chacun semble apporter à l'autre des éléments pour se (re)construire... Jusqu'aux révélations finales.
Maintenant, argumentons. Dans ce film, on retrouve le meilleur du cinéma de Shyamalan. Les défauts qui le rendront de moins en moins attrayant dans les productions à suivre ( "Signes" et bien pire, "Le dernier maître de l'air"...) ne sont pas encore présents, seules les qualités se dénombrent. Symétries parfaites des scènes traitant de David et de celles traitant d'Elijah, tendant toutes vers ce final monumental. Le gars s'accorde le temps de filmer des regards, des quiproquos, des malentendus... Il crée de la tension dans une cave entre un fils et un père soulevant de la fonte, ou au petit déjeuner entre le jus d'orange et le journal... Le mec est doué. Indéniablement.
Shyamalan j'ai souvent l'impression que c'est tout ou (souvent après) rien. Porteur d'un style qui est ensuite devenu tic, il aime s'attarder sur les familles, leurs fragilités, la difficulté de l'échange, la transmission. En deux films (Le Sixième Sens et Incassable donc) il donne à Bruce Willis les deux plus beaux rôles de sa carrière : Un homme qui doit se faire plus petit pour renouer avec l'enfant, un père ou un substitut de père qui doit retrouver de l'équilibre quand lentement les choses se délitent. Personne n'a mieux filmer le monsieur Willis depuis.
Quel drôle de film quand même. Je le disais, Shyamalan prend le temps de filmer un petit déjeuner, et par des mouvements lents depuis le même emplacement, comme un observateur soudainement témoin malgré lui d'un drame, nous offre en balancier, à droite, puis à gauche, puis à droite,... un moment incroyable entre un père, un fils, une mère, et un flingue. Simple. Beau.
Quel drôle de film encore. On le commence comme un drame familial mêlé de thriller, pour le finir, soudain éberlué de le découvrir, comme l'un des meilleurs films de super-héros. Le meilleur film de ce genre pour s'être intéressé au moment particulier et charnier de la (re)découverte des superpouvoirs, de la reconstruction par la vocation.
Et enfin (attention spoiler) quel drôle de film ! Le Némésis, cette figure en négatif du héros, si proche parce que si opposé, y est magnifiquement offerte au spectateur. Elijah, aka Samuel L. Jackson, y donne le portrait d'un méchant, " le méchant ". Le Némésis, c'est celui qui se construit main dans la main avec le gentil : tout deux souvent seuls, ils deviennent généralement amis, comme le fait remarquer Elijah à David dans le film. Proches par leurs angoisses, ils sont diamétralement opposé par le reste : Quand l'un appuyé par sa force choisit de se fondre dans le service d'autrui, l'autre dévoré par la haine de soi choisit les pires moyens pour parvenir à ses fins. Le Némésis, l'Ombre comme l'a décrit Campbell, le méchant comme on l'appelle fréquemment, ne se différencie du Héros que par une variable, une seule : ses choix. Le rappel du film lors de la scène finale de cette règle est brillant. Et la question suivante reste, incandescente : Est-il possible que parfois pour se trouver et se compléter, on ne puisse faire que le mauvais choix ?
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Créée
le 20 avr. 2016
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