Incubus par Mickaël Barbato
Vu ce pitch, et étant donné que le film fut tourné en 1981 (grande époque pour l'horreur), on aurait pu attendre de la tripaille et du cul. Déjà, ça, on élimine. L'anglais John Hough (Les Sévices de Dracula) n'est pas du genre à donner dans ces effets, et préfère jouer avant tout sur l'atmosphère et surtout la montée en puissance d'une intrigue plutôt banale.
Cette apparente banalité n'est pourtant jamais ressenti comme une lourdeur, bien au contraire. Comme dit, le film et la force qui s'en dégage le rapproche plus du thriller, voire du slasher avec ses séquences meurtres bien distillées. La mise en scène se met au diapason et joue beaucoup sur le mystère tout en s'autorisant quelques folies, dont une transition magnifique : le héros ouvre la porte d'entrée de sa maison en la tirant, passe la porte, la referme en la tirant et dans le mouvement on passe à une porte qui s'ouvre, celle de sa fille dans laquelle il rentre.
Voilà le genre d'effets technique qui apporte une certaine vitesse, un certain panache qui se ressent tout du long. Impossible de ne pas être concentré uniquement sur son écran dans ces conditions. Autre choix artistique, l'utilisation fréquente de la vue subjective. Jaws était passé par là et, tout comme Spielberg, Hough ne devait pas être convaincu par sa créature mais persuadé de la force du suggestif. Bien lui en a pris, car ces séquences, accompagnées d'effets sonores plutôt réussis car non extravagants, n'auraient jamais eu autant d'impact filmées de manière conventionnelle. Car le réal avait raison, sa bestiole n'est pas réussie et même plutôt craignos.
Côté interprétation... John Cassavetes, que dire de plus. Ce gars avait quand même une sacrée vraie tronche et un regard diaboliquement diabolique. Et son personnage est tout au long du film très ambigu, apporte une grosse dose d'angoisse. Toujours très fatigué, apparemment attiré par les jeunes filles et même par sa propre fille, encore terrassé par la perte de sa dernière conquête, son attitude interroge en même temps que la trame le dédouane. A cela on ajoute un jeune homme que tout semble accuser, sa grand-mère qui semble en savoir bien plus qu'elle ne le dit, une journaliste qui arrive bien vite à ses conclusions, des éléments d'enquêtes flipants (le sperme rouge...) et des flics totalement dépassés et on a un très bon suspens.
Malheureusement, la toute fin déçoit un peu par excès de démonstratif. Mais à part ça c'est du tout bon et si un éditeur pouvait mettre de côté l'un de ces films d'horreur pourris qu'on voit fleurir partout dans les rayons DVD pour nous sortir ce film méconnu en Z2 ça ferait bien plaisir.