Les réactions face au dernier Indy ont ceci d'amusant et de tragique qu'elles sont assez opposées. L'un vous dira que ce film est le plus mauvais Spielberg ou un ratage complet vis à vis de la série, l'autre vous dira au contraire que ç'est un excellent divertissement, tout à fait dans la mouvance des précédents. J'aurai tendance à suivre ce deuxième groupe, bien que minoritaire, et même à ajouter que cet opus arrive à renouveler un peu la série sans lui faire perdre son identité.
On peut l’imaginer tout au long du film, l'équipe aurait pu sélectionner une belle liste d'objectifs à atteindre tout au long du déroulement, avec une petite case à cocher s'ils avaient été atteints. Pour ma part, je les cocherais tous:
- Utiliser un nouveau contexte et le rendre crédible : Fini les nazis, svastikas et accents allemands, bienvenue à la guerre froide et à l'Amérique des années 1960. Pour ce que j'en sais, l'époque est très bien retranscrite. Le petit village du début du film fait plus vrai que vrai et à aucun moment on ne se dit: "que fait cette voiture ici?". Le ton général est respecté, notamment dans sa quête paranoïaque de chasse aux sorcières rouges qui se met en place. Le film se permet néanmoins d'obéir à certains clichés que l'on se fait de l'époque (la jeunesse divisée en blousons noirs, sportifs et rats de bibliothèque) mais il ne s'agit que d'un divertissement, pas d'une reconstitution historique froide et clinique.
- Faire ressentir le vieillissement d’Indiana Jones : Conséquence de ce nouveau contexte, l'aventurier est moins fringant. Tout au long du film, le poids des ânnées semble peser sur ses épaules, il n'est plus vaillant. En plus de ça, il ressent d’autant plus la désillusion d’être soupçonné d'avoir pactisé avec l'ennemi, contexte de chasse aux sorcières oblige, malgré tous les services qu'il a pu rendre à la nation,
- Préserver la continuité de la série : Le fan sera servi. Outre de nombreuses références aux films précédents, celui-ci se permet en outre de jeter des passerelles avec la série télévisée ou des romans. IJ IV respecte l'univers de la série et relie des éléments séparés pour lui donner encore plus de force. Le scénario n'est pas ce qui brille le plus dans la série mais qu'il soit cohérent dans ses différentes incarnations est un plus.
- Étoffer le casting : Même si ce dernier épisode n'arrive pas à égaler selon moi le succulent duo Ford-Connery du précédent épisode, cette suite propose une belle brochette de personnages secondaires. Leur multitude semble d'ailleurs sonner comme l’amorce d’un changement, comme si Indy était trop vieux pour faire tout le travail tout seul. Comme si la relève devait arriver. Du coup, ce dernier se retrouve accompagné d'un sidekick : blouson noir, jeune, arrogant et narcissique mais finalement avec un grand cœur. Ce n'était pas gagné, mais il arrive à être attachant. Le personnage est encore maladroit, mais il offre un complément intéressant au point de vue du héros.
- Utiliser un nouveau cadre pour renouveler l'aventure : Une des critiques revenant fréquemment concerne la part de science fiction dans ce film. Certains l'ont très violemment dénoncé, prétextant que cela dénaturait la saga. C'est leur avis. Le mien est plus réservé. Il est important de mentionner que le côté science fiction ne s'affirme qu'à la fin du film, et de manière totalement assumée. Précédemment, ce sont quelques mentions discrètes avec toujours autant de parchemins, ruines et trésors à découvrir. Enfin, puisqu'on parle de crédibilité vis à vis du reste de la saga, en quoi le personnage de la fin est-il moins crédible que le croisé immortel du troisième ? La saga s’est toujours aventurée vers des horizons surnaturels. Il y a de la science fiction dans cet épisode. Mais celle-ci se marie très bien avec l'univers de la saga, toujours aussi pulp, en laissant évidemment la part du lion à ce côté aventurier-explorateur-archéologue qu'on apprécie tellement.
- Offrir une aventure à la mesure des précédents Indiana Jones : Soyons francs, soyons courts: ce film, c’est de l'Aventure avec un grand A très Spectaculaire avec un grand S. De ce côté, le film semble vouloir faire mieux que Pirates des Caraïbes qui avait repris le flambeau de ce créneau suite à l’absence de Dr Jones. Merci aux images en synthèse pour assurer la relève. Quelques scènes sont cependant décevantes de ce côté là, telles que le passage en lianes ou la fourmillière, dont on voit les imperfections numériques. Mais d'autres valent le coup d'oeil, et plus particulièrement vers la fin. Certains critiquent le fait que le film soit trop "Spectaculaire", au point d'en perdre en crédibilité. C'est parfois vrai, tant on a l'impression d'assister à une certaine surenchère. Mais survivre dans un frigo en pleine explosion nucléaire, c’est du Indiana Jones craché, juste ce qu’il faut d’incroyable.
Je ne me risquerais pas à classer cet épisode dans la série. Pour ma part, il s'y insère dignement. Certes, il y a quelques petits défauts que j’ai cité. Mais cet Indiana Jones a pour lui un excellent rythme et surtout un respect total de l'univers. Le film s’apprécie pour son aventure et son second degré en hommage aux pulp, comme le reste de la sage. Si je peux comprendre les critiques qui lui ont été adressés, je les trouve souvent assez injustes. Le quatrième volet a les articulations qui craquent un peu, mais il démontre qu'Indiana Jones a encore de la réserve, et que son successeur n'est pas encore arrivé.