Ce film a coûté 2 millions de dollars.
Alors que The Compagny Men sort en salles la semaine prochaine, Inside Job, qui avait été assez discret en salles (bien que rentable), fait son apparition en DVD et Bluray. Que vaut le documentaire choc sur le krach boursier de 2008 ? Méritait-il l'Oscar qu'il a obtenu en février ?
La dépression mondiale, dont le coût s'élève à plus de 20.000 milliards de dollars, a engendré pour des millions de personnes la perte de leur emploi et leur maison. Au travers d'enquêtes approfondies et d'entretiens avec des acteurs majeurs de la finance, des hommes politiques et des journalistes, le film retrace l'émergence d'une industrie scélérate et dévoile les relations nocives qui ont corrompu la politique, les autorités de régulation et le monde universitaire.
Inside Job, c'est le prototype même de documentaire que tout le monde va adorer, principalement car sa mécanique tourne autour d'un concept simple, faire le procès de ceux qui ont ruiné le monde, éveillant autant la consternation que la révolte chez l'ouvrier façon Homer Simpson, qui du coup, sera certain que tous les maux de sa vie sont liés aux traders.
Charles Ferguson, le réalisateur, n'aime pas les traders et autres banquiers, ça on l'aura compris. Seulement, c'est de par cette haine incontrôlée qu'il se casse la gueule, car à être trop pressé de nous raconter à multiples reprises que ces messieurs prennent de la coke et se tapent des putes, il s'emmêle les pinceaux, en plus de faire dans le hors-sujet, et ne nous sert rien de bien différent de ce que l'on ait pu voir durant ces dernières années dans les médias. Monsieur Ferguson a un budget énorme (pour un documentaire), une narration signée Matt Damon (parce que si c'est un autre mec qui fait la voix-off c'est chiant), une bande-originale plutôt branchée avec du Peter Gabriel, du Ace Frehley, du Randy Bachman et du MGMT, à peu de choses prêt la playlist d'un épisode de Beverly Hills 90210. En somme tous les ingrédients sont là pour faire de Inside Job un produit cool, pour la simple et bonne raison que les gens aiment les lynchages, et même s'ils ne sont plus fait au bout d'une corde, société évoluée oblige, ils n'en sont pas moins contents.
Inside Job aurait largement pu gagner en crédibilité s'il s'était davantage concentré sur le côté pédagogique que sur le côté dénonciateur, mais non, il nous balance des chiffres de façon désarticulée, sans-cesse sous-titrés par des « pertes à cause de... ». Pire encore, le documentaire se moque considérablement des classes moyennes, ne leur consacrant que de brèves minutes, sans même les interroger, exceptés quelques travailleurs en Chine. Bravo, oui, c'est vachement représentatif pour nous occidentaux le changement de train de vie d'un chinois dont on ne sait rien.
Bref, Inside Job est un peu le documentaire que Michael Bay n'a jamais réalisé, suintant le patriotisme, le gros budget et le troll-movie que chaque troll a toujours rêvé de faire, au fond de sa cave. Je ne suis pas trader, je suis consterné par cette catastrophe financière, mais je le suis encore plus quand un documentaire s'offre des privilèges démesurés, en particulier quand celui-ci nous rabâche ce que l'on a déjà vu maintes fois au journal de 20 heures ou dans des documentaires bien moins prétentieux.
Pour conclure, si vous étiez dans le coma durant les dernières années, ce documentaire pourrait vous intéresser, résumant malgré tout plutôt bien les faits (si l'on laisse de côté le parti pris de l'auteur). Les autres y verront là un défouloire leur permettant d'extérioriser leur haine. Moi je n'y ai vu qu'un pamphlet ennuyeux et désorganisé, plus enclin à la dénonciation et au hors-sujet qu'à réellement informer la population. D'autres sujets bien plus graves mériteraient autant, sinon plus d'attention, et des moyens aussi conséquents, mais les grosses sommes d'argent ne sont réservées que pour les documentaires traitant de pertes d'argent. CQFD.