Je dois commencer par une difficile mais nécessaire confession: je connais assez mal l'univers des frères Coen, et pourtant, je sais que, d'un commun accord avec mes 3 films vus, je les aime bien (de Barton Fink en passant par True Gritt et Burn after reading). 4 maintenant et je n'en démords pas ! Entrons dans le vif du sujet de ce vrai-faux biopic à la non-gloire d'un paumé magnifique: Llewyn Davis qui n'exista jamais mais est inspiré de personnages bien réels, "figures historiques de Greenwich Village" sur lesquelles s'est interrogé Slate cette semaine (http://www.slate.fr/story/79618/inside-llewyn-davis-coen-modeles). Mais Llewyn Davis c'est avant tout son interprète : Oscar Isaac, plein de douceur, derrière une figure qui ne dégage pas beaucoup de recul humoristique sur sa situation. Oui, situation il y a puisque ce sont quelques jours et nuits (courtes) de loose qu'ont décidé de filmer les Coen. Des jours où Llewyn quitte Greenwich où il ne fait que, je cite, "faire tourner le chapeau" pour aller à Chicago, avant de revenir à New York, pas plus avancé sur la terre, décidé à s'embarquer (se ré-embarquer serait plus juste) sur la mer.

Durant son périple, Llewyn s'en prend plein la figure et c'est ça qui est magnifique, avec sa petite tête fatiguée et mal rasée, il encaisse, il ne dit rien, ou presque (la fin du début, le début de la fin: scène de tabassage derrière le bar où il se produit faute de mieux pour, dit-il, "payer un loyer" d'un chez-lui qu'il ne possède pas). Il est pétri de douleur dans ce qu'il n'accepte même pas de discuter: la perte de son partenaire de musique folk. Et ce n'est pas même sous les traits de deux chats légèrement fugueurs qu'il trouvera du réconfort, même s'il s'y accroche comme un prétexte pour ne pas avoir les mains vides, s'inquiéter de quelque chose de vivant, s’embarrasser...
Le parcours filmé par les Coen est donc celui d'un musicien qui fredonne et chante même des chansons belles à écouter, qui réchauffent un peu le cœur, des chansons pour emmener avec soi sur les routes, mais qui ne peuvent susciter un succès. Et même ça il l'encaisse sans rien dire. Llewyn est un tendre looser, mais un mauvais boxeur, il rend à peine les coups qu'il reçoit, vivotant de canapés en canapés, croisant des personnages plus ou moins recommandables, drôles souvent, paumés aussi.

C'est un chemin hivernal, boueux, nocturne mais aussi musical, chaque chanson est interprétée dans son intégralité, parfois même A capella et c'est une satisfaction. Si Llewyn est frustré de ne pas y arriver, nous ne ressentons jamais cette frustration de l'à peu près: tout est entier chez Llewyn: on le suit du début, à la fin avec délectation, même quand la route s'éternise et que, les pieds glacés, il retourne au point de départ. C'est que, tel un chat, il sait toujours rentrer dans son foyer. Sans en avoir un, il en a mille où toujours, même détesté, pour des raisons plus ou moins argumentées, il trouve toujours un petit coin, même frugal, pour enfin se reposer de tous ses échecs ...

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le 15 nov. 2013

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eloch

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