Un voleur plus délicat encore que Robin Hood: il faut que la victime soit riche et nazie!
Inside man m'avait simplement diverti lors de la première vision au cinéma. En le revoyant ce soir je me suis rendu compte que le scénario n'était vraiment pas très profond.
La mise en scène fonctionne. Bien huilée, bien américaine, des beaux mouvements de caméra léchés; parfois ça ne sert à rien d'aurte qu'à dynamiser le récit mais le réalisateur n'en fait pas des caisses: bref le réalisateur arrive à captiver son public par des esthétiques visuelle et sonore soignées.
C'est vraiment le scénario qui est faiblard. D'abord tout cet aspect 'on a une idée de génie pour sortir' est facilement anticipable par rapport aux combinaisons... ou impossible à anticiper pour la simple et bonne raison qu'on ne nous montre les travaux effectués dans la pière qu'à la toute fin... Ainsi, ce dernier retournement de situation me semble être un deus ex machina assez mal camouflé. Soit. Ce n'est peut être pas le plus important. En le revoyant je me disais qu'il y aurait toute cette construction minutieuse qui serait intéressante à revoir, ou encore les interactions entre personnages... Que nenni. Rien de palpitant. Revoir le film en connaissant déjà la fin ne donne pas vraiment une nouvelle dimension au récit. C'est juste trop simple.
Je dirai que le film peut se comparer à 'L'or se barre' (the italian job) dans la mesure où les deux films nous racontent un braquage parfait. Sauf que ce dernier cité, avec M Caine, est nettement plus alambiqué, plus ingénieux dans sa construction et dans la façon de déjouer les forces de l'ordre. Et si l'on découvre le plan au fur et à mesure tel un énorme deus ex machina progessiste, ça passe nettement mieux grâce à la dose d'humour apportée par des dialogues amusants et des acteurs so british. Ici, rien. Clive Owen est un acteur que j'aime beaucoup, mais il n'est pas très rigolo dans Inside man. Faut dire, ça ne semblait pas trop être l'intention du réalisateur.
Pour terminer la comparaison entre les deux films, je dirai qu'on y retrouve le même problème dramaturgique dans l'un comme dans l'autre: vu que l'intérêt unique du film réside dans la démonstration de l'ingénieux plan (enfin the italian job, au moins, montre les préparatifs, pas seulement l'exécution... tandis que Inside man se contente de l'execution), il n'y a pas vraiment d'histoire, pas vraiment d'enjeu; le spectateur sait que tout va bien se passer. Spike Lee tente d'amener un peu plus de conflits en lorgnant du côté des flics qui cherchent à comprendre, mais ce n'est passez appuyé (et donne plus une impression que le spectateur doit s'identifier au flic par le fait qu'il est autant largué que nous); de plus, on sent trop l'admiration du réal pour le personnage incarné par Owen, du coup, impossible de se méprendre: C'est bien lui le héro du film, lui qui a un plan parfait, et qui ne connaît aucun conflit dans le film (ah si une petite bousculade dans les escaliers).
Le dernier gros problème du film, et qui le différencie nettement du divertissement sans prétention qu'était 'L'or se barre', est que Spike ajoute une thématique bien lourde : la critique du capitalisme le plus vil ou quand la banque flirte avec le nazisme... Un sujet bien sérieux qui donne au film une dimension trop pesante pour une histoire de cambriolage sans véritables enjeux. Car en ne donnant pas de conflits au personnage principal, ça revient juste à montrer par une petite formule toute faite que les banquiers qui ont collaboré avec les nazis sont des ordures. Pire: sans les conflits, on ne peut pas ressentir ce que ressent le personnage principal ; le spectateur reste extérieur au récit.
Bon je ne sais pas si l'idée de mêler nazisme et braquage est une bonne ou une mauvaise idée, après tout, il existe certainement un traitement qui fonctionne (et qui a peut être déjà été fait), mais dans ce cas ci, le scénariste y va comme un bourrin, sans aucune subtilité, avec parfois des dialogues directement issus de la pensée idéologique du réal, sans aucune réflexion, sans aucune tentative de rendre les répliques plus subtiles. Et vas-y qu'on insiste: la mise en scène illustre ce qui est dit et les dialogues sont redondants. Il ne reste plus au spectateur qu'à souffler.
Enfin, je souligne quelques petites incohérences qui auraient dû mettre la puce à l'oreille à nos chers policiers. Tous les otages ont dû se mettre en sous vetements avant d'enfiler la combinaison. Par contre l'on remarquera que les cambrioleurs ont soit des t shirts, soit des débardeurs (un peu sale en plus), sous leur combi... Une erreur qui aurait facillement pu être évitée, en imposant aux preneurs d'otage de se mettre aussi en sous vêtements... Mais ça n'a pas été le cas! Comment aucun policier, aussi malin soit il, n'a remarqué ce détail probant? Autre erreur... comment l'équipe de voleurs a t elle pu rétrécir une pièce sans que personne ne s'en aperçoive après coup? Et enfin comment notre cher Clive Owen arrive à en sortir sans qu'aucune caméra, aucun garde aucune alarme ne détecte un mouvement inhabituel dans un endroit contrôlé (enfin je suppose que les sous sols d'une banque ordinairement interdit au public sont contrôlés...)
Bref, Inside man divertit grâce à une mise en scène soignée, mais souffre d'un scénario léger, tape à l'oeil, lourd, simpliste.