Insomnia était le dernier film de Nolan que je n’avais pas vu. J’avais toujours craint le visionnage de ce film. La faute aux critiques qui avaient tendance à le trouver passable, sans plus. Du coup, j’ai eu peur de regarder un Nolan passable, étant donné que chacun de ses films m’a fait vivre une expérience cinématographique unique. Allant du chef d’œuvre The Dark Knight, l’étourdissant Inception ou le spectaculaire Interstellar, Nolan n’en manque pas une pour m’en mettre plein la gueule.
En fait, ce que je craignais beaucoup, c’était de m’emmerder. J’entendais souvent que c’était un thriller au rythme trop lent et qui perdait le spectateur dans une ambiance beaucoup trop lourde. Et bizarrement, c’est exactement ce que j’ai adoré dans Insomnia. C’est un thriller lourd, haletant, tendu et lent. Un polar, un vrai de vrai.
Ainsi, Nolan nous amène en Alaska, où deux inspecteurs sont envoyés pour aider la police locale concernant le meurtre d’une adolescente. Très vite, le film part dans une narration des plus basiques. Un flic un peu blasé mais très réputé, des indices menant à différents suspects, le petit ami de la victime violent. Bref, du classique, ponctué par l’interprétation sobre mais efficace d’Al Pacino ainsi qu’un détail très important dans l’histoire, il fait toujours jour. Les personnages se retrouvent dans une région à une saison où le soleil ne se couche jamais, empêchant le personnage d’Al Pacino (Will), de dormir.
Bref, c’était bien parti pour être un film policier classique sans grande ambition. Et intervient un évènement que je n’avais jamais vu dans un film (oui, je sais que c’est un remake, j’ai pas vu l’original). Will tue par accident son coéquipier en tentant de poursuivre le meurtrier (qui a tout vu). Ainsi, le tueur va faire du chantage à ce pauvre Will insomniaque et mal mené. Si le tueur est attrapé, celui-ci dénoncera Will et toute sa carrière sera anéantie. C’est ce face à face entre Will et le tueur qui donne toute sa saveur au film, tout le suspens ! Soyons clair, j’ai été captivé par ce film. Les situations dans lesquelles se trouvent les personnages sont insolites, mais cohérentes. Ils sont emportés dans un spiral de mensonges et de magouilles où il est difficile de se retrouver. D’autant plus que Will n’a pas les idées claires à cause de son insomnie, rendant ses actions imprévisibles.
Ce qu’il y a de dingue avec le personnage de Will, c’est qu’on est jamais sûr de rien avec lui. On ne sait jamais s’il va entraver la loi en s’associant au meurtrier, où s’il va conserver un semblant de dignité en l’arrêtant. C’est tout le temps flou.
Le film joue également beaucoup avec la lumière et les décors. Notamment dans la scène du brouillard où Will tue accidentellement son coéquipier. Nolan joue avec les silhouettes qu’on aperçoit à peine dans le brouillard. Il joue avec nous, et j’adore ça. A côté, les décors de l’Alaska sont splendides. Et Nolan met parfaitement en valeur les montagnes qui entourent constamment les personnages, comme s’ils étaient enfermés dans ce lieu clôt où la barrière entre le bien et le mal est indiscernable.
Et puis les acteurs sont énormes. Je n’y croyais pas, mais Robin Williams est tout bonnement parfait en méchant. Je ne saurai dire comment, mais j’ai trouvé son interprétation parfaite, ses regards, son sourire narquois, sa voix rassurante. Son personnage est complexe, on n’arrive pas à savoir s’il a tué par accident ou si son meurtre a été désiré.
Al Pacino lui aussi est excellent. Il semble tout le temps fatigué et perdu dans ses pensées. Bref, une incarnation juste digne du grand acteur qu’il est.
Avec Insomnia, on est tout le temps perdu. Entre les faux indices et les vrais, les mensonges et les vérités, Nolan veut semer le désordre dans l’esprit du spectateur pour mieux le surprendre jusqu’à cette scène finale de toute beauté. Ça a marché sur moi, et j’ai juste adoré. Maintenant que j’ai enfin vu tous les films de Christopher Nolan, je peux le dire sans hésitation, c’est clairement mon réalisateur préféré.