Interdit aux chiens et aux italiens est une œuvre très personnelle pour Alain Ughetto, qui revient sur la survie de sa famille pendant le 20ème siècle, traversant les guerres successives, la pauvreté, et l’immigration. Dialoguant avec sa grand-mère, le jeune narrateur découvre l’histoire de ses grands-parents et parents, jusqu’à leur installation en France en fuyant le fascisme.
Le long-métrage est déjà surprenant dans ses manières de juxtaposer les prises de vue réelles et celles animées en volume, rappelant par exemple L’image manquante (2013), évoquant directement toute l’attache du réalisateur à ce sujet, où il y met beaucoup de lui-même. Ughetto n’hésite pas à prendre de la distance avec les extérieurs, filmant ses personnages de loin comme de près, sans jamais trop se prendre au sérieux. Le rire est provoqué très rapidement par le concours de circonstances, que le réalisateur ne souhaite jamais rendre trop tragique, n’appuyant pas l’émotion.
Cela est particulièrement efficace dans la durée du long-métrage, associant certaines mimiques de la famille comme de leurs habitudes à une émotion positive avant les drames successifs, où la vieille génération passe le flambeau à la jeune. La musique est particulièrement jolie, accompagnant le rythme de vie de cette famille, leurs joies et peines. Si Ughetto décrit son film comme militant, on ne saurait que trop lui donner raison tant il fait écho à la situation migrante actuelle et mondiale.
Les couleurs du films sont magnifiques, l’exercice n’étant pas évident par le stop motion, mais cela donne une vraie poésie au film. Le cinéaste a d’ailleurs utilisé des éléments du passé familial, notamment les châtaignes, carton et brocolis pour le décor et cela participe à l’absurde tragique qui naît des situations décrites à l’écran. Ughetto est réalisateur et artisan dans ce film, ne souhaitant que retranscrire manuellement le passé des siens.
Interdit aux chiens et aux italiens est un très beau morceau de cinéma qui enchantera son public, pour le peu qu’il puisse être découvert au cinéma. Doux et fragile, le film trouve sa force dans sa courte durée, concis et évocateur sans surdramatiser ce qu’il s’y passe. Une grande réussite.
A retrouver en intégralité : https://cestquoilecinema.fr/critique-interdit-aux-chiens-et-aux-italiens-vestiges-du-passe/