Interstellar a des défauts. De rythme, de cohérence et d'acting. Mais un Interstellar est un film qui résonne. Oui, il parle de l'aspect cyclique d'une vie, de la mort, de la force de la conviction et de l'inconnu comme unique manière de se repenser, avec le risque de perdre ce pour quoi l'être humain veut aller de l'avant, mais il fait bien plus que ça. Interstellar est le film du possible. Peu importent les vérités scientifiques et les libertés prises sur des soit-disant points cruciaux de physique et d'astronomie, il enclenche un pas vers l'ailleurs.
Beaucoup de longs-métrages évoquent les voyages spatiaux, encore davantage les montrent, mais aucun ne parvient à réaliser l'excitation et le danger de plonger sa main dans un engrenage qui va s'accélérer jusqu'au non-retour.
Insterstellar est cet espoir effrayant de la matérialisation d'un rêve, celui des mondes invisibles, à peine devinés et analysés derrière des télescopes et des spectromètres de masse. Comme l'incroyable manga de Naoki Uraswa, 21th Century Boys, le film de Nolan est une projection en pleine face de l'imaginaire dans la vie d'adulte : ce moment où, enfant, il est possible de rêver de découvrir cette base secrète de la NASA, d'être promu capitaine de son vaisseau et de partir à la conquête d'un océan glacé et infini. Il donne tout. Et c'est par cette simplicité d'accès - aux conséquences désastreuses - qu'Interstellar ouvre sa focale à fond pour y faire rentrer toute la lumière de l'espoir.
Il donne à saisir la facilité presque absurde avec laquelle l'humanité peut s'envoler, en quelques mois, dans des zones de la galaxie inimaginables, face à des chaos biologiques, sans que jamais rien ne paraisse totalement impossible. Comme dans Fringe où la transition entre les mondes se fait avec 3 bouts de ficelles et un cure-dent, Interstellar apporte du matériel à l'exploration spatiale, donnant le sentiment que tout un chacun peut aller s'y perdre. Le danger est ici, le prix à payer est à la hauteur de l'accessibilité. Mais dans un monde où les exoplanètes fleurissent, où Mars est à portée d'humanité, où finalement l'imagination recule face à la découverte scientifique, tout abandonner et s'envoler pour découvrir des panoramas qui pourront par la suite nourrir à nouveau cet imaginaire, n'est-ce pas un acte magique.
Interstellar est un immense film sur l'envolée et la beauté de ce qui est caché. L'un de ses slogans, "the answer lies above us" n'a jamais été pour moi lié à l'espace, mais à la force ce qui ne se rattache pas à l'humanité en tant qu'animal vivant sur la Terre, mais à ce qu'elle a de spécifique : sa faculté de projection.
Cooper s'arrache à la planète sur du "peut-être" et y revient sans comprendre totalement les raisons de sa survie. Tout est flou, il devait simplement être présent. Et c'est une beauté particulière que celle d'un univers qui se retourne sur lui-même pour forcer l'humain à se repenser et donc s'inscrire dans cet imaginaire. Il en fait finalement partie intégrante et le nouveau départ du pilote durant la scène finale n'est pas tant un goût du voyage qu'un réfléxe encore plus profond de celui qui sait désormais que derrière les étoiles, il y a un peu de ce que l'on y projette.