S’il y a bien un film cette année dont les ambitions mettaient la barre très haute, c’est bien « Interstellar », dernière réalisation de Christopher Nolan. Film de science-fiction au cadre réaliste de 2h 50, certains l’attendaient comme une version longue de « Gravity », d’autres comme le « 2001 : L’Odyssée de l’Espace » de Nolan. Le film précédent du réalisateur étant la semi-déception « The Dark Knight Rises », certains l’abordaient enfin avec une certaine crainte. Et si le film peut paraître un peu basique sur certains points, il est certainement à la hauteur des ambitions qu’il avançait.
Le personnage principal, Cooper, est interprété par Matthew Mc Conaughey, qui semble enchaîner les rôles marquant récemment entre « Dallas Buyers Club » et surtout « Mud ». Ce dernier joue donc un pilote aérospatiale reconverti dans le travail agricole suite à une pénurie des matières premières comme le blé partout dans le monde. Le cadre de départ est donc une réalité plutôt dystopique, puisque l’humanité est obligée de se recentrer sur sa propre survie, et tente d’oublier les rêves de découvertes et d’explorations, à tel point qu’elle considère le programme Apollo du XXème siècle comme une arme de propagande pour ruiner l’Union Soviétique, un gâchis de ressources inutile. Pourtant, le personnage principal n’a pas oublié son désir de découvrir de nouveaux horizons, et va se retrouver, malgré ses deux enfants mineurs, à partir dans l’espace à la recherche d’une nouvelle planète à coloniser…
La narration du film, où l’équipage va explorer plusieurs planètes en prenant à chaque fois le risque de perdre du carburant et du temps précieux, n’est pas sans rappeler le jeu vidéo indépendant « FTL : Faster Than Light », qui propose des enjeux et des risques similaires dans sa progression. Le spectateur est donc dans la même posture que les personnages, partagé entre l’idée fascinante de découvrir de nouveaux mondes potentiellement habitables et celle d’affronter leurs dangers. Un autre enjeu crucial du film réside dans le temps qui s’écoule, ce qui n’est pas sans rappeler le film « Inception » du réalisateur. Le temps s’écoulant beaucoup plus lentement pour l’équipage que pour la Terre, Cooper va donc constater l’évolution de ses enfants qui dépassent son âge à travers une séquence particulièrement émouvante. D'ailleurs, Nolan n'hésite pas, avec notamment la loi de Murphy et la relativité d'Einstein à mettre la science au centre des préoccupations des personnages. Ceux-là se demandent même comment défier les lois de l'espace et du temps, rien que ça.
Mais au-delà de son scénario, le film propose des paysages extra-terrestres grandioses et une représentation de l’espace qui sont le point fort du film. Jamais les planètes et trous noirs n’ont autant écrasé le spectateur sur son siège de par leur immensité et leur réalisme. Les moments les plus intenses du film sont souvent renforcés par la musique de Hans Zimmer, qui signe ici une bande-son collant en tout cas parfaitement à l'ambiance du film. Dans les thèmes chers à Nolan, on retrouve systématiquement la perception du réel qui est brouillé aux spectateurs comme aux personnages, et ce film ne fait pas exception à la règle : sa fin presque surréaliste nous le montre bien, et pourrait même en laisser certains perplexes. A noter quelques petites touches d’humour bien placée avec l’intelligence artificielle des robots, dont le design est au passage une référence bien plus subtile à « 2001 : l’Odyssée de l’espace » que celle de Tim Burton dans « Charlie et la chocolaterie »…
Un casting de rêve, avec un Matthew Mc Conaughey toujours aussi éblouissant, des scènes spectaculaires, des décors époustouflants, une narration qui ne faiblit pas durant 2h 50, Nolan a réussi avec brio son passage à la science-fiction. Son scénario a beau être un peu trop simple au départ (mais parfaitement efficace) et un peu trop déroutant et inexpliqué à la fin, son déroulement est solide, et l’on en ressort charmé, comme après un long voyage…