Le film comparé à 2001, le film de Nolan avec Mathew McConaughey déjà oscarisé, le film événement.
Alors chef d'œuvre ou escroquerie ? Un peu les deux camarade, disons que comme son précédent opus "Le Prestige" où s'affrontaient deux magiciens, le tour est habilement fait, on est transporté tout le film mais on voit les grosses ficelles du magicien juste à la fin du tour, ce qui gâche un peu l'expérience pourtant bien commencée.
Un tour peaufiné
Niveau réalisation, photographie, jeux d'acteurs, musique, effets spéciaux: rien à dire, le tour du magicien Nolan est peaufiné au minimètre, c'est pas là dessus qu'on pourra lui reprocher quoique ce soit. Même les scientifiques sans charisme, jouent superbien les scientifiques sans charisme, une performance. Peut être quelques longueurs au début mais rien de bien méchant.
Pour la suite attention spoiler, parce que les grosses ficelles sont scénaristiques. Je recommande donc de lire cette critique, après visionnage de l'œuvre.
La Terre est foutuuuue
Une maladie genre mildiou bouffe les récoltes, l'azote de l'air, l'oxygène, créé des tempêtes de poussière, bref c'est la merde. Qu'on m'explique alors en quoi l'évacuation de la Terre changera quoique ce soit ? C'est plus facile de s'exiler dans l'espace sans par miracle emmener la maladie avec soi que de créer des plantations in vitro en environnement stérile sur la Terre même.
Première grosse ficelle donc, trouver un prétexte pour envoyer en urgence notre héros dans l'espace, et sa fille travailler sur des équations à 5 dimensions.
Plus crédible pour le scénario, un soleil qui s'éteint ou va devenir nova (comme utilisé dans le roman de Clark chant de la Terre lointaine) ou un réchauffement climatique devenu incontrôlable aurait bien mieux fait le job. Mais bon les nuages de poussière devaient être chers à Nolan.
Planètes habitables autour d'un trou noir et autres aberrations scientifiques
Supermassif qui plus est. Un trou noir ne rayonne rien, ou presque (le rayonnement Hawking) donc pas de quoi chauffer une planète pour la rendre habitable. Le physicien qui a aidé Nolan pour le scénario dit que le disque d'accrétion du trou noir emmétrait suffisamment de lumière et de chaleur. OK, admettons. Donc ficelle moyenne, on fait orbiter les planètes autour d'un trou noir pour avoir le final et deux ou trois paradoxes temporels.
Le plus drôle est la gravité: il faut une fusée à 2 étages pour propulser le vaisseau sur orbite terrestre, mais les propulseurs de base suffisent pour arracher le vaisseau à la planète océan dont la gravité est... 130% supérieure à celle de la Terre. Encore une grosse ficelle, pas sérieuse dans un film de hard SF.
Boucle spatio-temporelle qui casse la physique au passage
Histoire de faire simple notre héros va sauver l'humanité en plongeant dans le trou noir et est sauvé in extrémis grâce à la création d'un tessarac qui lui permet de voyager dans le temps et de communiquer dans le passé et ainsi de sauver la Terre en communiquant avec sa fille. Waaah. Manipuler un trou noir, rien que ça. Le corps céleste le plus monstrueux de l'univers connu.
OK admettons encore qu'un civilisation hyper évoluée puisse les manipuler. Le problème est que notre héros pense que c'est la future humanité qui maitrisera la dimension du temps qui a réalisé ce prodige, pas des extraterrestres super évolués et bienveillants (on est américains, on a besoin de personne man !).
Donc mise en abime: le trou de ver et le tessarac ont été mis en place par les humains du futur afin de sauver les humains du passé et donc eux même. Le problème est: où commence la boucle ? Sans futur pas de passé et sans passé pas de futur. C'est le paradoxe de prédestination ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_de_l%27%C3%A9crivain ), un classique de science fiction, déjà utilisé dans Terminator et même... Harry Potter !
Bref ficelle pas si grosse mais pas mal usée.
Si au moins les sauveurs avaient été des extraterrestres qui manipulaient le temps ça aurait été un peu plus original (quoique déjà utilisé dans les Maitres du temps de Moebius) et permis d'éviter le paradoxe. Mais le passage où Cooper donne la main à Brand dans le passé confirme la théorie de Cooper donc exit les ET...
E=Love²
L'amour est le paramètre qui explique que les humains du futur n'ont d'autre choix que Cooper père relié par amour à sa fille Murphy comme messager via ondes gravitationnelles à travers le temps.
Le problème de Nolan est d'avoir annoncé un film scientifiquement crédible, hard SF et digne successeur de 2001.
Mais autant que je sache, l'amour n'est pas entré dans les équations de nos chers physiciens, cosmologues ou mathématiciens.
Bref une énoooorme ficelle, qui même si elle est poétique va à l'encontre de tout le reste du film et laisse le spectateur qui utilise plus son cerveau que son cœur quand il regarde Interstellar avec un léger sentiment de s'être fait rouler dans la farine. Non je que je condamne ceux qui ont aimé Interstellar avec leur cœur, il m'est arrivé la même chose plus d'une fois sur d'autres films. C'est juste qu'une fin fleur bleue à un film annoncé scientifique m'a pas mal déçu. Nolan pensait faire original avec ce twist (déjà utilisé dans... le 5eme élément), il échappe de peu au ridicule, seul ses talents de réalisateur font (difficilement) passer la pilule.
Le fond du trou... noir
Donc voilà, je confirme que l'on est coincé dans le trou noir situé entre le chef d'œuvre et escroquerie. Un de mes éclaireurs est arrivé à la même conclusion en des termes bien mieux imagés et peut être un peu forts:
"Bref, Christopher Nolan ne change pas. Comme avec le Prestige (dont le scénar est à peu près crédible) ou Inception, c'est la même formule : branlette narrative qui n'a aucun sens donnant lieu à un gros spectacle visuel qui joue un max sur les déformations de la réalité, saupoudré d'un peu de morale con-con. (...)
Christopher Nolan c'est un peu comme Michael Bay, sauf que quand il était gamin, au lieu de juste jouer avec ses jouets en faisant des bruits d'explosion postillonnés, il faisait discuter ses Action Man à propos de théories de la physique quantique et de psycho-neurologie qu'il avait lues vite fait sur Encarta"
Rien à ajouter...