Mouais... Commençons par les points positifs, et ils sont nombreux. Tout d'abord, le casting est très réjouissant. L'excellent Matthew McConaughey (Dallas Buyers Club, True Detective...) campe un père de famille et astronaute parti à la recherche d'une nouvelle planète habitable, laissant ses enfants sur une Terre de moins en moins accueillante pour l'humanité. Les seconds rôles sont tenus par Anne Hathaway, Jessica Chastain, Casey Affleck ou encore Michael Caine (grand habitué des films de Nolan), tous très justes dans leur prestation. Ils sont accompagnés par TARS, un robot blagueur plutôt cool, ressemblant étrangement au monolithe de Kubrick... Ensuite, techniquement, Interstellar est irréprochable. Christopher Nolan opte pour une mise en scène classique, s'opposant donc au tour de force visuel qu'était Gravity, mais parvient tout de même à nous impressionner avec des plans et des paysages sidérants de beauté. Comme à son habitude, le réalisateur privilégie le décor naturel, tente d'éviter les effets spéciaux et tourne son film en pellicule, ce qui donne une image plutôt jolie, avec un grain assez inhabituel dans ce type de blockbuster, on a l'impression que les vaisseaux sont réels, usés... Bref, un véritable plaisir pour les yeux et les oreilles (avec cette épique BO d'Hans Zimmer qui réussit à nous impliquer émotionnellement et physiquement).


Mais avec Interstellar, et c'est là que réside l’intérêt du film, Nolan s'intéresse surtout au temps. La question de la temporalité, thématique déjà très présente dans ses précédents longs-métrages, est le cœur même du récit, ce qui donne lieu à deux scènes particulièrement marquantes :


La séquence sur la planète d'eau premièrement, puis celle des fameux 23 ans de messages (dans laquelle voit le vieillissement accéléré des personnages) qui fait monter les larmes aux yeux et fait de ce film l'une des œuvres les plus émouvantes de son auteur.


Passons maintenant au principal problème d'Interstellar, son scénario. Outre cette thématique du temps qui est correctement développée, le film pêche vraiment sur son écriture, multipliant les facilités scénaristiques et autres Deus Ex Machina complètement improbables. Les exemples sont nombreux, je ne vais pas m'amuser à tous les citer, mais il y a entre autres :


Ce moment les personnages se font arrêter en trouvant une base hyper secrète de la NASA mais finalement c'est cool parce qu'ils avaient justement besoin d'un pilote, ou encore cette scène un brin téléphonée des bibliothèques inter-dimensionnelles (fatalement, dès on traite d'un paradoxe temporel, on finit toujours par se casser la figure), que McConaughey manipule sans aucune difficulté d’ailleurs. S'ensuit un sauvetage (coup de bol) totalement invraisemblable du héros...


Autre problème lié à l'écriture que l'on remarquait déjà dans les précédents films de Nolan : les personnages ont tendance à tout expliquer, tout le temps, uniquement dans le but de faire avancer le scénario (dans Memento par exemple les acteurs n'étaient que des pions servant au déroulement de l'histoire). Ce qui n'était pas trop gênant dans Inception et The Dark Knight, puisque chaque protagoniste était doté d'une personnalité forte. Mais dans Interstellar, les personnages manquent cruellement d’humanité (d'ailleurs à chaque fois que quelqu'un meurt, tout le monde s'en fout), les dialogues sont froids, assommants et bourrés d'explications ennuyeuses... Personnellement, je n'ai rien compris. Trop de charabia scientifique (excepté ce monologue cul-cul sur le pouvoir de l'amour), c'est à se demander si les acteurs comprennent ce qu'ils disent. Ayant perdu le fil de l'intrigue à la moitié du film, je n'arrivais plus à profiter pleinement des "scènes d'actions", la plupart liées au...


personnage joué par Matt Damon, dont je ne comprends toujours pas les motivations.


Pour conclure je dirais qu'Interstellar brille par ses qualités visuelles et techniques mais déçoit à cause de son scénario laborieux et incompréhensible (après, c'est peut-être juste moi qui ai un QI de 25). À voir malgré tout pour une poignée de moments de grâce tels que la poursuite dans le champ de maïs en début de film, l'atterrissage sur de la planète de glace ou ces scènes de la planète d'eau et des messages citées plus haut... Et puis, sans vouloir lancer de polémique, cela reste beaucoup moins pénible que 2001, L'Odyssée de l'espace !


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le 26 juin 2015

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