La bande annonce d’Interstellar a produit sur moi un effet inversement égal à celui qu’elle a eu sur la majorité des gens : je n’en avais rien à foutre. Mais rien. C’était inutilement mystérieux et pédant.
Après avoir vu le film, je lui reconnais néanmoins le mérite de n’en avoir rien divulgué, et c’était très bien comme ça.
Parce qu’Interstellar est un film de science-fiction dans l’espace de grande envergure avec des secrets. Comme tous les films de Nolan, on sent l’ambition (certains diront prétention et ils n’auront pas forcément tort) qui le porte.
Ici, il s’agit ni plus ni moins que de répondre à Kubrick et d’imposer une nouvelle référence du genre. Comme environ tous les films de science-fiction depuis 1968 ou presque, on retrouve quelques gimmicks tirés de 2001. La voix et l’esprit très « humain » des robots, les messages vidéos des proches restés sur terre, l’esprit des scènes dans l’espace. La patte du maître (dont la plus grande réussite est justement la beauté des scènes qu’il a tournées) se fait sentir.
Les humains, ces gros cons
Dans Interstellar, la menace est plus immédiate : les humains, ces gros cons, ont bousillé la planète. Les plantes meurent, la terre sèche, il n’y aura bientôt plus rien à bouffer. C’est un peu simpliste mais ça marche pas mal.
Du coup, il est devenu urgent de trouver une solution. Celle qui est envisagée est bien de trouver une autre planète à envahir (coloniser). Et c’est là que les protagonistes entrent en jeu. Mystérieusement mis sur la voie, ils se retrouvent embarqués dans l’aventure : la recherche de planètes habitables, le trou de ver, le trou noir géant.
À partir de là, les choses s’accélèrent : si le film dure 2h50, il faut avouer qu’on ne s’ennuie pas (enfin, sauf à un moment, mais on y revient dans un instant). Il faut récupérer les astronautes partis en éclaireurs, faire des choix importants, organiser la survie, celle de l’équipe dans l’espace et celle de l’espèce humaine. Le film prend soin de ses héros dans l’ensemble même si tout est un peu trop lisse. L’intrigue rebondit et révèle des choix audacieux, judicieux, tant en termes de scénario que d’acteurs.
Nolan est plus intelligent que vous
Malheureusement, comme dans tout film récent de Nolan, on prend le spectateur par la main pour lui faire comprendre ce qu’on affiche à l’écran. Ça devient poussif et ça le reste jusqu’à la fin, où le fantastique (les courbures de l’espace temps créent un vilain paradoxe pas du tout utile) dispute à la science-fiction (le tesseract, comme l’explique brillamment Professeurgeorges sur sa page) une conclusion hasardeuse.
Cette pirouette permet au réalisateur de finir son film tranquilou et de laisser le spectateur dans un état d’hébètement exacerbé, entre jubilation et lassitude.
La complexité imaginaire d’un film pourtant basé sur un tas d’éléments crédibles (au moins du point de vue théorique) le perd dans les travers habituels du réalisateur. Sa prétention, alliée à une histoire rendue compliquée pour rien, provoque un ennui terrible lorsqu’on percute que Nolan nous prend pour des cons.
Plutôt que livrer un film intelligent et obscur, il se contente d’un grand spectacle facile et au lieu d’un objet profond mais simple, il préfère en saloper la portée par une manigance incohérente, un tour de passe-passe d’arnaqueur de rue.
Restent alors les idées, les plans, l’esthétique, la musique grandiose. Les qualités d’un film sympa.