Lors de mon Erasmus en 2018 à l’université de Bamberg (Allemagne), j’ai participé à un Vorbeireitungskurs, c’est-à-dire un cours de préparation à une année universitaire en Allemagne. En plus d’exercices pour parfaire sa maitrise de la grammaire allemande, de l’orthographe, de la littérature etc, on s’intéresse également à la culture au sens plus classique du terme. Dans ce sens et également pour nous faire un exercice d’expression orale, le professeur nous a demandé de préparer un exposé sur un élément culturel qui nous était cher. Tandis que certains ont présenté leur ville d’origine ou leur activité favorite, j’ai choisi de présenter ce qui était alors mon film préféré à l’époque: Into the wild de Sean Penn. Bien que j’ai vu de meilleurs films qu’Into The Wild depuis ces 6 dernières années, il n’en reste pas moins juste de considérer ce long-métrage comme un film de qualité.

Je pense que le pitch du film, partir et vivre loin de la société me parlait plus alors que je débutais mon Erasmus et que j’allais vivre pour la première fois à l’étranger, que maintenant où, après avoir beaucoup déménagé, j’ai un peu moins envie de bouger et de changer de cercle social tout le temps. Il n’en reste pas moins que je suis encore bouleversé par cette belle ode à la liberté.

Ce film comporte de nombreux points positifs, je vais néanmoins commencer par ce qui me dérange un peu dans le film et qui fait que je ne lui mets « que » 7,5/10. Je trouve que pour un film qui se déroule dans la nature, avec des paysages aussi variés et dont la beauté est un des thèmes principaux, ça aurait mérité dans l’idéal une proposition esthétique forte. Or c’est assez classique en termes de mise en scène, c’est sûrement un peu d’audace qu’il a manqué à Sean Penn pour véritablement faire de ce film un chef d’oeuvre.

Cela étant dit, j’essaie de ne pas être obsédé par cette idée de proposition esthétique radicale quand je vais voir un film, et je tente de toujours garder une part de moi qui est susceptible d’être ému par un blockbuster. Il ne faut pas mépriser le cinéma populaire. Même si une grande audience ou des résultats spectaculaires au box office ne doivent jamais faire autorité pour une critique, quand des millions de gens apprécient un film ce serait de la malhonnêteté intellectuelle de dire que ça n’a rien de positif. Il s’agit ici d’un gros succès commercial (56 M d’euros de recettes au box office pour un budget de 15 M, sans compter les 16 M de recettes pour la version DVD).

Une des choses réussies dans ce film, c’est le fait de retranscrire l’amour de la famille de Chris (Emile Hirsch), et surtout de sa soeur Carine (Jena Malone) pour celui-ci, alors qu’on ne le voit presque pas avec sa famille à l’écran. Cela intervient notamment via une voix off où Carine nous raconte la manière dont elle perçoit le départ de Chris. Ce qui aurait pu être un peu cucu (ouin ouin mon frère il est parti) se trouve être une belle manière d’illustrer un amour fraternel.

Les personnages que Chris rencontre sont hauts en couleurs sans être caricaturaux, c’est habile dans l’écriture du scénario (Sean Penn est également le scénariste). Quel bonheur de retrouver Catherine Keener (Jan), déjà la meilleure actrice dans 40 ans, toujours puceau (2005) de Judd Apatow.

Je terminerai en évoquant ce qui symbolise pour moi une des plus belles scènes de l’histoire du cinéma, elle me fait pleurer (et je pleure très rarement devant un film). C’est la scène où Chris (c’est important de rappeler également que le film s’inspire de l’histoire vraie de Christopher McCandless qui est allé vivre en Alaska pour fuir la civilisation) meurt. Il y a d’abord l’absurdité, la fragilité de l’être humain illustrée par cette bourde, ironie tragique. Chris a lu trop vite son livre sur les plantes en Alaska et a confondu une plante comestible avec une plante mortelle. Le moment où il s’en aperçoit en serait comique si ce n’était pas aussi terrible, il en déduit que son épopée a été absurde: « Happiness only real when shared ». Ensuite, son agonie et, à l’aube du décès, le moment où il s’imagine rentrer à la maison, voir ses parents. Il regarderait le ciel avec ses eux, et se demande alors s’ils verraient le ciel (ou sa vision de la beauté du monde?) de la même manière que lui, où les cieux semblent se déchirer et les nuages rapetisser:  "What if I were smiling and running into your arms? Would you see then what I see now?"

Créée

le 4 sept. 2024

Modifiée

le 4 sept. 2024

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Vincent Engel

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