Un mien ami avec qui j'étais allé voir la très réjouissante production du Châtelet m'avait recommandé le film. Je n'y ai guère accroché. que par à-coup. Je ne crois y être entré vraiment que sur certains des numéros de Meryl Streep - excellente, j'assume - ou, par exemple, d'un "Agony" traversé d'une dérision assez sympathique. Les comédiens ne sont pas mauvais, le tout est bien chanté, d'un chant bine intégré à l'action, quelques scènes même passent bien, mais on reste, pour ce que j'en ressens, très souvent en deçà du propos.
Déjà, on a du mal à se perdre, dans ces bois. on peine à comprendre pourquoi tout le monde se retrouve aux mêmes endroits de la forêt - difficulté dont une représentation scénique, à devoir le travaille, sait en général mieux se tirer. Le réalisme des décors (à l'éclairage somptueux, j'ai trouvé) y est pour beaucoup, en ce qu'il rend ridicules ces improbables rencontres en un lieu où par essence on se perd. Une stylisation plus poussée, un peu plus de rêve, auraient sans doute évité ce défaut. Il aurait pu être intéressant également d'éviter de rendre trop mobile une caméra qui, pour mieux s'adonner aux clichés cinématographiques du cinéma américain contemporains (multiplications des angles, des plans, des mouvements), ne parvient pas à prendre le parti du statisme inévitable d'une narration que sa forme veut comme succession de numéro, et traitée comme telle par le réalisateur.
Quant au propos, il est lénifié. Si Johnny Depp fait un loup bien inquiétant, les allusions sexuelles à peine déguisées du texte sont trop peu soulignées par la mise en scène pour qu'on comprenne même certaines paroles du Little Red Riding Hood - elles tombent à plat, tout simplement, ou semblent de la dernière des maladresses - ce qui, s'agissant de la virtuosité du livret de Sondheim est assez triste. Au fond, tout est survolé, rien n'est assez drôle pour être grinçant, rien n'est assez tragique pour être remuant. Into the woods à la sauce Disney, cela nous vaut un final sur le mode héroïque à l'extrême opposé de l'intention du texte ; et c'est la disparition du meurtre - à mon sens essentiel à l'intelligence du propos - du narrateur. En bref, c'est un Into the woods un peu plus épicé que ce à quoi ces studios nous ont habitué, mais si affadi par rapport à l'original que je suis déjà en train de l'oublier, à l'exception déjà noté de l'incarnation de Meryl Streep en mère-sorcière abusive.
Pas plus de la moyenne sur mon échelle perso, donc. C'est dommage, vraiment.