Invisible Man s'inscrit dans la lignée cinématographique des monstres Universal, à l'instar des figures légendaires de Dracula, du Loup-Garou, de la créature de Frankenstein... La peur que suscite ce personnage ainsi que ses enjeux sont mis au gout du jour avec un accent féministe avéré. La relecture de Leigh Whannell, que ce soit dans son scénario ou sa mise en scène, est impeccable et étonnante. Dès la scène d'ouverture, on sent le poids d'une vie de couple chaotique, installant alors une angoisse qui ne nous lâchera pas. Car oui, tout en nous faisant frissonner et en dosant parfaitement son suspense, Invisible Man se risque à un thème ô combien d'actualité : la violence conjugale faites aux femmes. Ainsi, au lieu de placer le monstre au centre, l'histoire adopte le point de vue de la victime ; une femme persécutée par son mari, tant moralement que physiquement, et que personne ne prend au sérieux. Tout le monde la croit folle, ne voyant pas ce qu'elle est convaincue de voir. Tout est suggéré afin de mettre l'accent sur le point de vue paranoïaque du personnage principal. Des grands espaces vides deviennent alors extrêmement angoissants. En effet, la caméra est souvent cadrée de façon inhabituelle, s'attardant dans les recoins lors de plans-séquences redoutables, afin de suggérer qu'une présence imperceptible se tient en silence. Pas de musique stridente et d'effets anticipants les sursauts, on est ici dans une démarche subtile, insidieuse et malsaine. On se laisse avoir par ce jeu du chat et de la souris, savamment amené et de plus en plus étouffant, la violence des scènes allant de paire avec un regard de plus en plus dérangé de Elisabeth Moss. La performance de cette dernière est d'ailleurs l'une des clés de la réussite du film ; à la fois cinglée, et physiquement investie. Elle apporte aussi tout un aspect psychologique qui nuance le genre. A cela s'ajoute un coté imprévisible, impitoyable et amoral, rendant à cette revisite toute sa splendeur horrifique originelle. Malgré quelques invraisemblances notables, Invisible Man réveille notre peur du vide et du silence et promet de belles et douces insomnies.

alsacienparisien
8

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le 9 mars 2020

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