J’ai détesté Alfie version 1966, mais j’avais encore espoir pour le remake, qui semblait porter un regard un peu plus moderne sur les relations et le personnage du séducteur.
J'ai envie de poursuivre ma série sur les films traitant de la drague, et Alfie était recommandé sur IMDb après que j’aie vue Roger Dodger (qui est le moins connu, mais jusque là celui que j’ai préféré sur le sujet).
Je n’aime pas particulièrement Jude Law, mais il est à l’aise et crédible dans le rôle de ce nouvel Alfie, qui ressemble étrangement à celui incarné par Michael Caine (le look, la coupe, l’accent anglais), tout en ayant été efficacement remis au goût du jour.
Séducteur un brin présomptueux, le héros collectionne les femmes, et plus généralement se sert d’elles, puisqu’il profite aussi de son charme pour obtenir des services de celles qui ne l’intéressent pas sexuellement.
Le personnage a quelque chose d’odieux, sans pour autant être détestable, à la fois parce qu’il est moins irrespectueux, et parce qu’il est représenté de façon plus amusante que dans le film original.
Le point de vue d’Alfie sur son mode de vie libertin est plutôt divertissant, il aime faire des remarques cyniques mais pertinentes sur les relations, et même si ses réflexions n’ont jamais rien de révolutionnaire, elles sont agréables à entendre. L’écriture est plutôt futée et inventive, il y a notamment ce running gag sur le fait que les protagonistes ressortent des termes qu’ils ont appris sur leurs calendriers du type "mot du jour".
Ce remake représente aussi bien moins les femmes comme des cruches ; elles ne sont pas aux basques d’Alfie, en fait elles ignorent qu’il va voir ailleurs, et il joue avec leurs sentiments de façon plus pernicieuse.
Son mode de vie n’est pas dépeint comme plus moral, mais en tout cas de façon un peu plus complexe, et du coup plus intrigante. Le personnage se rend compte au bout d’un moment qu’il ne ment plus juste à ses conquêtes, mais à lui-même, pour justifier à ses propres yeux le mal qu’il fait.
De peur de se faire rattraper par ses sentiments, Alfie cherche à leur échapper auprès de femmes qui ne signifient rien pour lui. Ca aurait pu être intéressant d’explorer cette facette du séducteur, mais ça devient ennuyeux de suivre le héros passer d’une conquête à une autre, sans qu’il ne se passe grand chose de particulièrement prenant.
Au bout d’un moment, les conséquences des actes du héros le mènent à se retrouver de plus en plus seul… mais l’évolution se fait de façon peut-être trop lente, et trop fade.
Et pourtant, il y a beaucoup d’éléments qui, pris à part, me plaisent dans ce remake.
Si l’intrigue comporte de grosses différences par rapport au film de 1966, il y a des scènes que l’on retrouve, mais réinterprétées de façon beaucoup plus intelligentes et subtiles : je pense à la scène où Alfie devine la présence d’un autre homme, où au lieu de voir des objets qui n’ont rien à faire là, cette fois le personnage tire simplement des déductions à partir du comportement de sa maîtresse. Ce qui fait que la scène s’appuie sur la justesse du jeu des acteurs.
De même pour les scènes de séduction, autrement plus sensuelles, qui présentent un travail élaboré sur le langage corporel ; c’est comme voir une danse soigneusement chorégraphiée.
Mais pour un film qui propose une vision moderne des relations, il y a des touches qui nous ramènent des décennies en arrière, comme avec ce personnage du gynéco gay un brin caricatural.
Je suis partagé aussi quant à la mise en scène en général : la réalisation reste sobre la plupart du temps, mais il y a quelques moments où ça se lâche un peu sur les effets du type accélérés alliés à un panoramique, transitions par un flash, …
Il y a quand même quelques petites idées sympa de mise en scène, mais j’ai surtout été étonné par la beauté de la photographie. Les ambiances nocturnes sont superbes, avec ces éclairages colorés très doux sur les personnages, ce rendu magnifique des matières, …
Mais là encore, tout n’est pas parfait, car il y a une séquence qui perd complètement en subtilité, où pour représenter le froid et la solitude du héros, tout prend soudain une teinte bleue.
J’ai du mal à comprendre comment ce remake d’Alfie peut comporter tant de qualités et de défauts, sur les mêmes points. Il y a beaucoup d’éléments que j’ai appréciés, mais je n’ai pas réussi non plus à trouver le film complètement prenant.
Ce n’est pas mauvais, mais je sens que je l’aurai vite oublié…