Après ma chronique d’un film de loup-garou (Bad Moon) et celle d’un film de vampires (Vurdalaki), si je voulais que les planètes continuent de tourner dans le bon sens et qu’il ne se mette pas à pleuvoir des sauterelles, il fallait que je suive la logique et que j’enchaine avec un film de zombies. Lorsque je me suis récemment intéressé à la filmographie de Colin Minihan suite au visionnage de What Keeps You Alive, j’avais gardé dans un coin de ma petite tête que ce dernier avait réalisé un film de zombies en me disant qu’il faudrait que j’y jette un œil. C’est donc en toute logique que je me suis lancé dans It Stains The Sands Red, sorti chez nous directement en DVD sous le titre Bloody Sand. Petit budget (5M$US), It Stains The Sands Red est assez inclassable, à mi-chemin entre le road movie, le survival, le huis-clos dans un désert qui s’étend à perte de vue, le tout parsemé de scènes décalées voire burlesques mais aussi de scènes bien trashos comme il faut.
Colin Minihan semble aimer le cinéma sobre, beau, classe, et surtout minimaliste. Et une fois de plus ici le nombre de protagonistes est réduit à son strict minimum. L’idée de départ de Colin Minihan et Stuart Ortiz est très simple : on va faire un film de zombie mais avec un seul zombie et tout le film il va poursuivre une seule personne. Le décor est déjà fixé à l’avance : ok, il y a des zombies, ça a même été dit aux infos, pas la peine de parler de comment l’épidémie est arrivée, et on se centre rapidement sur cette « course poursuite » si on peut appeler ça comme ça, ou plutôt cette longue marche à travers le désert, dans laquelle une fausse blonde superficielle, camée, insouciante, va petit à petit prendre conscience de plein de choses grâce à un zombie qui va la suivre jour et nuit afin de lui arracher la jugulaire et déguster ses intestins. Une sorte de rédemption forcée qui fera passer la demoiselle de jeune fille frivole à mère courage, et toute la psychologie qui en découle.
Ce zombie sera d’abord un danger, puis petit à petit, il deviendra un compagnon de route à qui elle va parler tout en marchant, se confier, afin de ne pas sombrer dans la dépression, afin de ne pas abandonner. Elle va se moquer de lui, se défouler verbalement sur lui, l’engueuler quand il arrivera à lui faire tomber son petit sachet de poudre blanche qu’elle s’envoie dans les narines. Il deviendra son traine charge et même son garde du corps dans une scène, certes un peu facile, mais pleine d’ironie où le zombie va gagner peu à peu en humanité, là où les humains, en période de survie, vont perdre leur humanité. Jusqu’à ce que même naisse une certaine amitié entre les deux et qu’on arrive à ressentir de la compassion pour le zombie.
Toute cette partie dure 1h. Une première heure vraiment très réussie où le ton très décalé et absurde de certaines situations vient renforcer cette idée de départ des plus originales. Un humour parfois très fin, parfois très trash (le coup du tampon), qui est parsemé dans une première heure au final assez lente, mais en aucun cas ennuyeuse. Très peu de gore, même si quand il y en a, le film n’hésite pas à montrer de la tripaille. Très peu de paroles également, même si on se régale du dialogue à sens unique entre l’héroïne et son acolyte zombie dans l’incapacité de répondre. Tout est centré sur ces deux personnages et leurs interprètes sont absolument fabuleux. Tout le film repose sur ce duo, et plus particulièrement sur Brittany Allen. Elle a une prestance hallucinante, à la fois juste, touchante et émouvante. De même pour Juan Riedinger, qui incarne un zombie plus vrai que nature et qui arrive à être très “réel” malgré la palette limitée d’expressions qu’offre un tel rôle.
It Stains The Sands Red explore la rédemption, le courage extrême, le surpassement de soi, la transformation de soi. Mais au bout de la 58ème minute, le film prend une tournure qu’il n’aurait pas dû. A partir de là, d’un film de zombie au point de départ original, il devient un film de zombie plus classique. Un peu comme si le réalisateur ne savait pas comment finir son histoire et que, par conséquent, ou par facilité, il s’était mis sur le chemin habituel, devenant pour le coup beaucoup moins intéressant, beaucoup moins intense. Ce revirement conclut effectivement la transformation de l’héroïne, mais il était tout à fait possible de faire ça autrement, dans la continuité de la première heure. Et c’est très dommage car le film perd en intérêt, un peu comme un soufflé qui retombe.
S’il avait continué sur sa lancée, It Stains The Sands Red aurait pu être un excellent film de zombies qui sortait des sentiers battus. On aurait pu tenir là une petite pépite, mais à cause des trente dernières minutes, la note finale en prend un coup.
Critique originale : ICI