Allez viens, on va manger des Miel Pops
Très mal promotionné au moment de sa sortie (on se souvient de ces affiches omniprésentes, assez laides et surtout ne ciblant pas la bonne audience), J.C est avant tout le premier long-métrage de Jonathan Zaccaï.
Un film d’acteur donc ? Film pour les acteurs ?
La structure du film est directement empruntée à « C’est arrivé près de chez vous », en forme de faux documentaire type portrait. L’équipe technique hors champ investi progressivement le cadre à mesure qu’elle se prend d’affection et interagit avec son sujet, ici un enfant roi réalisateur de type nouvelle vague 2K.
Du film belge, « JC » reprend, avec plus ou moins de réussite, cette formule aussi de la situation drôle et dérangeante créée par la caméra et le silence des sujets filmés (très bonne séquence du père humilié par son fils qui tarde à répliquer sous l’œil du documentariste).
C’est là que ça devient à la fois très bon et en même temps un peu foutraque : d’une part le dispositif de vrai-faux documentaire manque de cohérence et ne permet pas d’atteindre la solidité de « ‘est arrivé près de chez vous » par manque de vraisemblance (les plans caméra épaule marchent bien et puis, au sein de la même séquence, d’un coup on a un champ-contre champ sur une conversation avec des comédiens trop bien maquillés). Une vraie question se pose : Jonathan Zaccaï fait-il exprès d’utiliser une mise en scène à ce point dérangeante et hétérogène ou alors est-ce un défaut de fabrication plus u moins assumé et sensé passer à l’arrière plan ? J’ai envie de pencher pour la première option, d’autant qu’on a par exemple droit à la fois à un mixage / prise de son assez roots (voix parfois difficilement audibles) et au contraire un montage son assez précis, notamment en ce qui concerne les bruitages et la musique additionnelle (la scène du créateur de la musique du film « Dutroux in the rain » vaut son pesant d’or).
Pour finir avec les petites choses qui font que le film n’est pas une totale réussite, ou qu’en tout cas il a manqué son public, on remarquera aussi que le personnage de Marie, la petite copine étudiante à l’ENA tendance ecolofacho rigolote, est parfaitement campé par son actrice mais pas très bien amenée par le scenario. A aucun moment je n’ai cru à son amour pour JC… Peut être manque-t-il des scènes hachées par la production ?
Si le film est moins cohérent et structuré que « OSS 117 » par exemple, il n’est pas moins comique, notamment grâce à Vincent Lacoste qui est toujours parfait.
Son personnage est soutenu par des répliques d’une qualité d’écriture indéniable : toujours drôles mais parfois touchantes :
« Je suis fou de personne à part moi-même. Mais quand t'es pas là, je m’aime un peu moins quand même.».
Enfin, Jonathan Zaccaï s’appuie sur un casting composé de ses potes, de ses collaborateurs mais aussi au final d’un jeune comédien qu’il admire ouvertement. Ce côté copinage a put être reproché au film. La critique est parfaitement injuste car le projet se fait en finesse et on sent un réel amour de tous ces personnages, systématiquement humiliés mais tous sauvé par un plan ou une réplique. Un exemple : Zilberstein, traitée comme une courtisane défaite qui finit saisie au détour d’un plan volé, en train de danser seule dans une chambre d’hôtel trop grande et luxueuse avec une majesté totalement inattendue. Ce plan à lui seul vaut bien plus évidement que les films de Caméos à la Canal (Asterix, Marsupilame, etc…) mais aussi, entre autres, que les réalisations de Maiwen.
Film hommage à la nouvelle vague, « JC » est à la fois une satire sévère mais juste de l’héritage laissé par une clique de réalisateurs issus de la critique. Une clique prétentieuse, qui a toujours clamé haut et fort une richesse culturelle (finalement très pauvre au regard de la prétention de types comme Godard ou Truffaut) et une ambition politique et sociale. A ce titre la séquence d’interview devant un chantier ou le pastiche de JLG pendant le générique de fin sont hilarantes.
« Avant j’étais reporter de guerre. Maintenant je filme des gens. Filmer la guerre et filmer les gens c’est un peu la même chose »
Comme JC, JZ n’est pas tendre avec le spectateur, il travaille tout en faux rythme, alterne humour potache et hypersexualité de certaines situations. Jonathan Zaccaï porte haut ses ambitions et termine le film (ou presque) avec un montage au ralenti d’un enfant en bas âge faisant le Jackson Pollock. C’est drôle et c’est beau.
Une séquence entre Marie et JC, elle a l’impression qu’il n’est pas réel, qu’il risque de disparaître. Cette séquence fait échos à celle entre JC et sa maîtresse alcoolique (Elsa Zilberstein, toujours très belle) qui le met en garde contre les vampires du métier. Le film est une déclaration à son jeune acteur, il essaie de faire ressortir tout le potentiel de Lacoste en utilisant le star system lui-même : ce n’est pas le comédien qui incarne un personnage mais le personnage qui est une incarnation de la star. Une star fragile puisque directement liée à l’âge de Vincent Lacoste, thème omniprésent de « JC Comme Jésus Christ ».
"J'ai envie de t'aimer jusqu'à l'âge de Line Renaut"
La plus grande réussite de François Truffaut c'est Antoine Doisnel. Acteur phénomène, le destin de Vincent Lacoste devra être celui d’un Jean-Pierre Léaud. C’est là la belle vision de Jonathan Zaccaï et ça vaut bien qu’on ré évalue ce premier long métrage.
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