Cher Stéphane, votre film "Je suis mort..." a été une véritable ré-jouissance ! Je l'ai vu samedi soir aux Cinq Caumartin, à Saint-Lazare, Paris. On se tordait, pour la plupart, la salle n'était pas comble, loin de là, mais les gens qui avaient fait le pas ne s'étaient pas trompés de film.
J'aimerais comprendre pourquoi vous n'avez pas atteint de plus grandes salles. C'est scandaleux, probablement l'univers et le rire que vous proposez ne sont pas assez bourgeois. Voyez-vous, je comprends très bien la réussite d'Intouchables, de Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu, de Rien à déclarer ou de Bienvenu chez les chtis, c'est gras, ça me désole mais je comprends les millions d'entrée, ça ne m'étonne point. Cependant, je ne saisis pas l'invisibilité de votre film. Un road-movie de la Belgique au nord québécois, farcesque et rock'n'roll, de quoi voyager encore des jours et des nuits après, chez les Innus, je ne suis pas encore revenu de cette contrée fabuleuse.
Ce qu'il y a de remarquable, c'est de ne point tomber dans le bon sentiment, dans la bondieuseurie sans dieu contemporaine. Chaque fois, vos personnages passent de l'exécration au "je m'en foutisme", du rejet à l'embrassement sans bornes du tout-venant, vous avez totalement compris que le heurt était l'énergie et que la vie était, dans la mesure du possible, à vivre ainsi, dans l'embarquement. Je viens probablement de dire n'importe quoi. Ah, oui, au fait, l'entêtement de l'aviateur et de celui qui finit avec Marie-Soleil, pris dans le dévalement effrayé de l'aérophobe, c'est sublime. Les photographies du nord ainsi que celles du cheminement méandreux du train, époustouflantes. Et "fais voir si Marie-Soleil et soleil ça rime bien", anthologique.
Ne pas arriver à L.A. était le plus beau cadeau que vous puissiez nous faire. C'est en quelque sorte un joli pied-de-nez au cinéma mainstream, je le prends comme ça.
Encore bravo, merci, et très bonne continuation.