Les frères Duplass aiment les microcosmes. Ils aiment mettre en place des situations simples et y apporter une touche d'excentricité afin que puisse s'y enchevêtrer ensuite une succession d'événements plus ou moins inattendus, suivant un humour souvent pince-sans-rire. Ils l'avaient déjà fait avec The Puffy Chair, Baghead ou encore Cyrus, qui signait une formidable rencontre entre deux grandes gueules de la comédie, John C. Reilly et Jonah Hill. Une nouvelle fois ils nous servent un grand duo, composé de Jason Segel, que nous n'avons plus besoin de présenter, ainsi que Ed Helms, petit bonhomme qui grimpe et eut enfin droit à sa tête d'affiche il y avait à peine un an avec Bienvenue à Cedar Rapids. Une rencontre qui avait tout pour plaire, cela sans compter sur la présence de Susan Sarandon, ainsi que la moins connue mais néanmoins talentueuse Judy Greer. Les amateurs des années 80 auront d'ailleurs vite reconnu une icône de cette époque, Rae Dawn Chong, qui en profite ici pour faire un retour sur les devants de la scène, à peu de choses prêts aussi fraîche qu'à l'époque où elle secondait Schwarzy dans Commando.
Cela étant, la farce prend mal. Les Duplass se sont enfermés dans leur bulle, et à force d'aimer les sujets simples ils ont fini par voir trop petit et n'osent jamais s'engager vraiment sur le moindre des terrains. La comédie reste en surface et ne fait rire que sporadiquement, l'émotion avec les retrouvailles familiales s'efforce tellement d'éviter le mièvre qu'elle ne suscite que peu d'intérêt, et les secondes trames viennent meubler l'ensemble avec une platitude qui a vite fait d'être déconcertante.
Un constat d'autant plus dommage que le casting était pourtant là et que les choses démarraient plutôt bien, dans un esprit original et doux-amer avec un frangin gentillet accroc au cannabis perdu dans des pensées absurdes, à l'opposé de l'autre, plutôt sale con, pris dans une scène de ménage aux dialogues fins comme les Duplass savent nous en servir. A cela on ajoutera le choix assez déroutant d'avoir quasiment entièrement tourné le film en caméra portée, ce qui donne l'affreuse impression d'assister à un épisode de The Office, autrement dit un faux documentaire.
Jeff Who Lives At Home n'est donc pas la réussite, et surtout la rencontre, à laquelle on aurait pu s'attendre. Il n'en reste dans sa globalité pas totalement désagréable, grâce à quelques passages intéressants, notamment vers début, et puis vers la fin, que ça soit lorsque la romance entre Susan Sarandon et son admirateur secret se dévoilera, de même que la réunion finale, ainsi que l'accomplissement du destin du personnage de Segel, venant mettre à mal toute notion de libre arbitre.
C'est court, donc ça se voit vite, mais hélas ça s'oublie également à bride abattue, la vacuité du sujet, en plus de l'impression de l'avoir déjà vu traité 10.000 fois, n'aidant pas à l'imprimer de façon définitive dans la mémoire à long terme.