A priori, Jennifer's Body a tout du film d'horreur pour adolescent(e)s en mal de sensations fortes, ayant trop les pétoches pour se délecter d'un film réellement effrayant et à la fois certains d'y retrouver les miroirs de leurs fantasmes hormonaux. A priori, c'est ce qu'il est, un ramassis indigeste de clichés vomitifs et sur-exploités par le production du genre actuel, qui n'hésite pas à grossièrement asséner le spectateur de poncifs prévisibles vus et revus et ne pouvant se targuer d'un minimum de subtilité.
Car se serait mentir que de nier l'aspect bourrin et ultra-stéréotypé du film, martelé pendant 1h30 de clichés inévitables et inhérents au type de métrage auquel il appartient, le teen-movie horrifique, sorte de mélange gras entre American Pie et Tamara, la finesse émotionnelle de Buffy en moins : tout est fait pour rendre familier aux spectateurs le cadre pourtant si atypique de cette banlieue américaine étouffante et moribonde qu'est Devil's Kettle – le titre en lui-même est auto-dérisoire et signifie bien l'envie des auteurs de recréer un univers en carton contrefaçonné – : la cheerleader reine de promo gâtée par la nature qui revêt ici les formes généreuses (bien sûr que le choix est réfléchi, mais peut-être pas comme on le croit) de Megan Fox, l'intello bigleuse et effarouchée (Amanda Seyfried), le groupe de rock mielleux admirant la carrière de Green Day tout en sacrifiant des groupies sur l'autel de la gloire (certainement les personnages les plus imbuvables de tous), le gothique sensible et maniéré encore plus maquillé que le chanteur du groupe cité plus haut, ou encore le quaterback star du lycée que la belle va croquer dans la forêt d'à côté.
Jennifer's Body pourrait se réduire à ça s'il l'on s'en tenait au premier degré habituellement requis par ce genre de production, mais ça serait mésestimer Diablo Cody qui nous a quand même offert le scénario du jubilatoire Juno.
Jennifer's body, c'est une parodie déjantée quand on le regarde de cette façon : on nous fait croire à un film purement débile, écœurant et ridicule, alors qu'il est en fait pleinement conscient de l'être et s'en donne à cœur joie. Les deux dames aux commandes savent pertinemment ce qu'elles font, et jouent sans temps mort la carte parodique dans un délire (presque) assumé. Et elles ont visiblement réussi leur pari, puisqu'en lisant la majorité des avis masculins (et féminins, aussi) sur le film, le premier désavantage notable est la chasteté de la réalisation qui n'en montre pas assez. Pourquoi donc caster Megan Fox ? parce que c'est un appât irrésistible et que Karyn Kusama et Diablo Cody ont eu envie de se payer notre tronche. Megan Fox (encore plus qu'Amanda Seyfried lui tient compagnie) canalise un grand nombre de fantasmes masculins qu'on nous renvoie perpétuellement à la figure.
Jennifer's Body, qualifié de féministe à sa sortie, me semblerait davantage sexiste si je ne l'avais pas reçu avec un second degré : l'effet figures masculines et féminines inversées, les femmes sont mises en valeur pour leurs atouts physiques et le pouvoir qu'elles en dégagent – Jennifer, c'est une belle allumeuse – mais ça serait renier le fait que si elles utilisent en effet cette force de séduction sur les hommes (ceux devant comme ceux derrière l'écran) c'est pour mieux la retourner contre eux...
...après tout, ceux que la beauté rend aveugle sont ensuite annihilés (dévorés, en fait) par cette même beauté dans des scènes d'un burlesque fendant. Malheureusement, le second degré est le seul principe sur lequel repose le film qui, à force de comique de situations répétitifs (notamment les deux personnages aux antipodes l'une de l'autre mais toutes autant têtes à claques), a tendance à, en effet, devenir écœurant tant son côté comics et la superficialité de l'ensemble – sans parler de la voix off surexplicitant la moindre action – finissent par insupporter. Bancal, même si le potentiel aurait pu être encore mieux et plus finement exploité.